Le télétravail, bien plus qu’un mirage?
Des milliers de travailleurs frontaliers traversent chaque jour leur frontière respective pour se rendre au Luxembourg. L’épidémie de Covid-19, aussi subite qu’endémique et dangereuse, touche le monde entier et pousse les institutions et entreprises à revoir leurs modes de fonctionnement en privilégiant le télétravail pour les activités qui s’y prêtent. Le gouvernement luxembourgeois a lui aussi revu sa législation avec ses voisins. N’y aurait-il pas des leçons à tirer de ces crises sanitaire et économique qui nous révèlent les bienfaits du télétravail sur le trafic routier et la qualité de l’air ?
Jusqu’en mars dernier et avant l’arrivée brutale de l’épidémie de Covid-19 en Europe et au Grand-Duché, le télétravail – hormis celui de très courte durée – représentait encore le lointain mirage d’une société du futur. En l’espace de quelques jours, celui qu’on repoussait sans cesse à demain pour des causes fiscales notamment, est devenu réalité. Au vu des circonstances inédites, et avec pragmatisme et réactivité, le gouvernement luxembourgeois a trouvé des accords avec l’Allemagne, la Belgique et la France concernant les nombreux travailleurs frontaliers. Depuis le 14 mars dernier, la présence d’un employé français à son domicile ne sera pas prise en compte dans le délai de 29 jours autorisé par la législation en vigueur. La même disposition a été prise pour les Belges qui, eux, bénéficiaient d’un délai de 24 jours. Les travailleurs français et belges ont ainsi la possibilité de télétravailler de façon illimitée et sans désavantage fiscal considérable. En Allemagne, une réglementation temporaire a été décidée: les jours ouvrables travaillés à domicile sont considérés comme des jours ouvrables au Luxembourg. Au niveau fiscal cependant, au-delà de 19 jours, l’Allemagne taxera les jours travaillés.
Chômage partiel et diverses aides
Le 27 mars dernier, le Premier ministre Xavier Bettel est revenu sur ce point en conférence de presse. «Le télétravail est une réalité. Il permettra à l’avenir de désengorger certaines zones qui concentrent de nombreux travailleurs et donc de diminuer le trafic. Il faut cependant que le travail concerné s’y prête bien», a-t-il indiqué.
Par ailleurs, l’Etat a lancé un plan de 8.8 milliards d’euros qui devra répondre aux multiples crises causées par le coronavirus. Les indépendants et TPE disposeront d’une aide forfaitaire de 5.000 euros. Cette mesure soutiendra les entreprises qui ont dû cesser leurs activités et qui ne peuvent pas promouvoir le télétravail. Un milliard d’euro sera dédié au chômage partiel.
Des avantages environnementaux
De cette expérience de télétravail «forcée» naîtra vraisemblablement davantage de réglementations qui faciliteront sa mise en place à l’avenir. L’environnement, lui, respire depuis que les décideurs politiques ont appelé au confinement de la population. Les routes et autoroutes bouchonnées et polluées aux heures de pointes se retrouvent désertes, laissant place à une qualité d’air qui s’est nettement améliorée. Quant à la technologie, elle permet aux différents collaborateurs de ne pas rompre le lien social et professionnel à coup de visioconférences, d’appels téléphoniques ou de discussions instantanées. Après la crise, lorsque les cœurs et les corps seront apaisés, il s’agira de panser les plaies, mais aussi de réfléchir au développement du télétravail car il aura sans nul doute un rôle à jouer dans la construction d’une ville intelligente, efficiente et durable.
Par P. Birck