QUEL AVENIR POUR LE MONDE DU TRAVAIL APRÈS LE COVID-19 ?

Même si elle est loin d’être finie, la crise sanitaire a déjà provoqué de profonds bouleversements dans notre quotidien, ne fût-ce que dans notre manière de travailler. Le télétravail, notamment, a fait une irruption massive dans nos vies professionnelles et a changé radicalement notre modus operandi. Mais celui-ci va-t-il pour autant perdurer, une fois la crise passée ? Pour répondre à cette interrogation et bien d’autres, Arthur Meulman, CEO de jobs.lu, décortique pour nous les faits saillants d’un sondage réalisé par sa plateforme d’annonces d’emploi en ligne. D’avril à juillet 2020, entre 800 et 1 900 internautes ont répondu à plusieurs questions sur l’emploi et le Covid-19.

D’après votre enquête, 73% des participants déclarent que le coronavirus a influencé leur manière de travailler au quotidien. À votre avis, en quoi cette crise sanitaire a-t-elle modifié le monde du travail ?

Avant l’apparition du coronavirus, de nombreuses entreprises estimaient que le télétravail relevait de l’utopie. Suite aux mesures de confinement prises par les différents gouvernements en Europe, le télétravail est devenu obligatoire en quelques jours seulement pour de nombreux pans de l’économie, principalement le tertiaire. Le souci est que cette transformation s’est opérée très vite. Je dirais même trop vite.

De prime abord, on pourrait en effet penser que le travail à la maison est nettement moins stressant qu’au bureau. C’est d’ailleurs l’opinion de la moitié des personnes que nous avons sondées. Vous n’êtes plus obligé de rester coincé dans les embouteillages tous les matins pour vous rendre au travail. Vos horaires sont plus flexibles. Les réunions virtuelles présentent parfois un côté plus humain, surtout lorsqu’on voit passer derrière le client ou le collègue un chien, un chat ou un enfant. Mais le télétravail ne présente pas que des avantages. Tout le monde n’a pas forcément chez soi les mêmes outils bureautiques que sur son lieu de travail, qu’il s’agisse d’une imprimante, d’une photocopieuse, d’un scanner ou d’écrans multiples. La césure entre la vie professionnelle et la vie privée est plus difficile à réaliser. Les deux se déroulent dans le même environnement et le sas de décompression que représentait le chemin du retour à la maison n’est plus là. Le télétravail génère également chez de nombreuses personnes un profond sentiment de solitude et d’isolement.

Cette nouvelle manière de travailler n’est-elle que temporaire ou continuera- t-elle après la fin de la pandémie ?

Pour un grand nombre d’entreprises, le télétravail a prouvé son efficacité et sera de plus en plus utilisé à l’avenir. D’autres, au contraire, reviendront rapidement à un schéma de travail plus classique parce qu’elles estiment qu’il est pratiquement impossible de créer un esprit d’entreprise lorsque tout ou partie de l’activité se fait à distance.

Deux tiers des personnes interrogées estiment être aussi ou plus productifs à la maison qu’au bureau. Selon vous, ce sentiment correspond-il à la réalité ?

Vous pouvez effectivement être plus productif à la maison à condition d’avoir une discipline assez stricte. Sans en faire trop pour autant ! Travailler toute la journée dans le silence le plus complet à en oublier de manger et de se ménager des pauses n’est pas non plus la bonne méthode. Trouver un bon équilibre entre vie privée et vie professionnelle à la maison n’est pas évident, surtout lorsque vous passez sans transition d’une forme de travail à une autre. À cet égard, le rôle du manager est primordial. Il doit à la fois pouvoir rassurer ses équipes, les aider à être les plus productives possible et être à leur écoute en cas de problèmes. L’âge des collaborateurs joue également un rôle. Les aînés de la génération X sont généralement plus à l’aise dans un environnement de travail classique que leurs cadets des générations Y et Z, plus individualistes, plus soucieux de leur vie privée et plus branchés sur les nouvelles technologies.

Pour de nombreuses entreprises, le télétravail sera de plus en plus utilisé dans les années à venir

Cela étant, je pense que dans le futur, les entreprises qui mentionneront dans leurs annonces d’emploi la possibilité de travailler – entièrement ou partiellement – à domicile se démarqueront de la concurrence, en particulier auprès des tranches d’âge les plus jeunes.

Plus de la moitié des personnes interrogées estiment que le Covid-19 pourrait avoir un impact négatif sur leur emploi. Partagez-vous cette opinion ?

Je la partage en partie. Il est évident que la crise sanitaire entraînera d’importantes pertes dans toutes les professions liées à l’hôtellerie, la restauration, les débits de boisson, l’événementiel et les voyages. Dans quelle proportion ? Il est impossible de le prévoir à l’heure actuelle. Tout dépendra également du soutien que le gouvernement sera prêt à leur apporter. Le point positif est que les emplois liés à la finance, l’IT, l’ingénierie et la construction – pour ne citer qu’eux – n’ont pas été beaucoup touchés par la crise sanitaire. Le nombre d’annonces d’emploi que nous avons reçu de la part de ces secteurs d’activité n’a que très peu baissé durant ces neuf derniers mois.

Il faut également garder en tête que la crise que nous traversons actuellement n’est que passagère. Une fois que celle-ci aura pris fin, l’économie redémarrera de plus belle. Il suffit de voir l’empressement avec lequel les gens se sont rendus dans les bars et les restaurants lors de la première phase de déconfinement. D’après moi, il n’y aura pas de retour à la normale avant 2022.

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