CRÉER UNE MATIÈRE PREMIÈRE SECONDAIRE
David Bousrez, directeur d’Ecotec, situé dans la zone industrielle Gadderscheier à Sanem, présente ses activités de revalorisation des déchets. Il revient sur les principaux cycles de vie d’un produit, mais aussi sur ses craintes vis-à-vis des nouveaux matériaux utilisés dans la construction, tout en insistant sur le principe d’écoconception.
« Environ 80% des déchets que nous accueillons ici à Sanem proviennent du secteur de la construction, 10% viennent des entreprises industrielles et le reste des administrations communales voisines », résume David Bousrez, directeur du centre de tri et de valorisation Ecotec. Environ 40.000 tonnes de déchets y transitent et y sont traités chaque année: des déchets de la démolition et de la déconstruction mélangés, des matières plastiques, en passant par le bois ou encore les déchets inertes tels que les pierres ou le plâtre qui sont les résidus classiques du domaine de la construction. « Le recyclage est un marché complexe. Pour autant la valorisation des déchets et le recyclage font partie de nos priorités et sont nos principaux objectifs. Par contre, ceux qui ne sont pas recyclables sont utilisés pour produire de l’énergie, mais nous essayons au maximum de remettre à disposition sur le marché les matières premières ou secondaires pour les recycleurs. En résumé, nous sommes tributaires des entrées des déchets sur notre site, mais aussi de ses sorties », détaille David Bousrez.
Le Luxembourg, un modèle ?
Le déchet ne doit plus être considéré comme tel, mais comme une matière réutilisable, le terme en lui-même se redonne une nouvelle approche et change donc de sens, tout comme les décisions politiques et les mentalités. « Je trouve que le Luxembourg fait partie des excellents élèves en Europe dans ce domaine, notamment depuis l’instauration et surtout la mise en application de la loi du 21 mars 2012 concernant la gestion des déchets. Le Grand-Duché est même devenu un exemple en matière
de tri obligatoire et de collecte. Je pense avant tout que l’éducation des enfants dès le plus jeune âge reste primordiale pour changer les mentalités et le regard vis-à-vis des déchets et du respect de l’environnement. Ce qui impacte nécessairement l’ensemble des autres secteurs comme celui de la construction, où le tri des déchets s’est amélioré puisqu’il est très souvent réalisé directement sur le chantier par les équipes sur place. Nous sensibilisons et conseillons les entreprises pour être plus efficaces dans nos relations et améliorer le travail de chacun », détaille le directeur d’Ecotec.
Le principe fondamental de l’écoconception
Le domaine de la construction, justement, regroupe plusieurs types de déchets d’époques différentes. « C’est un secteur traditionnel, donc nous sommes souvent confrontés à d’anciens matériaux, d’il y a 10, 20, 30 ou 40 ans voire plus. Ce sont parfois des déchets composés de produits dangereux comme l’amiante (fibrociment amianté) et c’est aussi notre rôle d’éliminer ces erreurs du passé », poursuit David Bousrez. Et le présent ? Selon lui, les nouveaux matériaux utilisés dans le bâtiment et leurs impacts dans la vie quotidienne sont encore flous, notamment pour la partie recyclage de même que leur tri.
« Aujourd’hui, beaucoup évoquent l’isolation dans les nouvelles maisons par exemple, mais de notre côté, c’est l’inconnu. Que fera-t-on avec ces produits une fois qu’ils ne seront plus utiles? Car ces isolants sont parfois mélangés à d’autres produits, par exemple polystyrène, laine de bois, laine de roche,… auxquels s’ajoutent à certains d’entre eux des adjuvants qui améliorent les propriétés des matériaux ou bien pour optimiser la sécurité des personnes, être apyres,… Je pense par exemple aux tuyaux d’évacuation d’eau en polypropylène ou encore au polystyrène expansé. Alors oui, la sécurité est importante, mais il ne faut pas oublier non plus l’environnement et voir cette problématique de façon globale: tous ces adjuvants rendent pour l’instant les produits très compliqués à recycler », se méfie-t-il. Tout l’enjeu se trouve dans le principe d’écoconception qui, pour résumer, intègre les aspects environnementaux dès la conception et le développement d’un produit ou, ici en l’occurrence, d’un bâtiment.
« Il faut tendre vers cette mentalité. Lorsqu’un produit sort du marché, il doit être pensé pour ses possibles utilisations futures et notamment pour le recyclage. Là encore, c’est le but de l’économie circulaire ».
Un marché déstabilisé
« Nous faisons également face à une nouvelle problématique, surtout depuis le début de l’année 2018, lorsque la Chine a décidé de bloquer ses importations de certains déchets comme les matières plastiques… alors qu’elle en était le premier importateur il y a peu de temps encore. La globalisation et la mondialisation entrainent des répercussions partout ailleurs et donc en Europe et au Luxembourg, le marché du recyclage se trouve ainsi déstabilisé ».
Derrière ces difficultés se cachent pourtant de nouvelles opportunités. « Il s’agira de mettre en place des installations de recyclage au niveau européen afin d’être plus respectueux de l’environnement, et donc d’éviter de naviguer des milles et des milles marins avec des conteneurs jusqu’en Asie», étaye le directeur, qui voit à travers ce prisme, une opportunité d’innover au niveau de la fabrication même de plastique plus écologique et aussi, d’en finir avec cette logique erronée du « tout-jetable ».
Ecotec sarl
Z.I. Gadderscheier
L-4984 Sanem
www.ecotec.lu