LE SECTEUR AUTOMOBILE ENTRE COUPS DE FREIN ET D’ACCÉLÉRATEUR

Le moteur économique tousse et, bien que l’électrique accélère, les ventes de véhicules freinent. Dans ce contexte, l’Autofestival devra jouer les amortisseurs, il en va de la santé de tout un secteur. À quelques jours de son coup d’envoi, Philippe Mersch, président de la Fédération des distributeurs automobiles et de la mobilité (FEDAMO), partage avec nous son analyse de la situation. Interview.

Quel bilan tirez-vous de l’année écoulée pour le secteur automobile ?

Comme pour bien d’autres secteurs, l’année a été compliquée. Elle a commencé par l’introduction de la gratuité des transports en commun ; une mesure qui n’a finalement pas eu d’impact significatif sur l’automobile. La mobilité individuelle a d’ailleurs été davantage plébiscitée avec l’émergence de la pandémie de Covid-19 car jugée plus sûre. La crise a agi comme un coup de pub pour la voiture, la moto ou encore le vélo. Malgré tout, nous estimons que le nombre d’immatriculations a chuté d’environ 20% (ce qui équivaut à 10 000-12 000 voitures de moins) par rapport à l’an dernier. Une diminution qui a un impact significatif sur le chiffre d’affaires du secteur, aussi bien pour les vendeurs automobiles que pour les assureurs. Si d’autres professions ont été encore plus fortement touchées par la crise, cela reste un coup dur.

À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Quelles seront les particularités de l’Autofestival 2021 ?

Depuis la reprise de nos activités, le 18 mai dernier, nous respectons des mesures sanitaires strictes validées par le ministère de la Santé. Tous les membres de la Fédération qui s’inscrivent à l’Autofestival s’engagent à respecter ces mesures à la lettre. Il en va de notre responsabilité. Malgré les restrictions, les essais restent possibles moyennant certaines précautions. S’ils sont accompagnés par un vendeur, le port du masque est obligatoire. Dans tous les cas, la désinfection complète du véhicule est requise avant et après l’essai, de même que la mise en place de protections au toucher. Dans une grande partie des showrooms, les voitures sont fermées à clé afin de conserver une certaine maîtrise sur les véhicules à désinfecter. Si les mesures devaient être amenées à changer d’ici le début du festival, ces précautions seraient alors évidemment adaptées.

Pour ce qui est du festival en lui-même, nous avons décidé d’en allonger la durée de cinq jours. Plutôt que de commencer un samedi, il débutera un lundi dans l’idée de réduire le nombre de visiteurs présents simultanément dans les showrooms. Nous prévoyons également de développer davantage les contacts digitaux. Aujourd’hui, et les statistiques le démontrent, le premier ciblage d’un acheteur s’effectue d’abord sur internet, sur les sites des constructeurs en particulier. Il me semble important d’insister aussi sur les vitrines numériques des concessionnaires parce qu’elles recensent bien souvent les offres spécifiques au marché local. Le site fedamo.lu référence tous les concessionnaires du pays sur une carte permettant de trouver en un coup d’œil le point de vente d’une marque le plus proche.

2021 sera-t-elle enfin l’année de l’électrique ?

L’attrait pour l’électrique est réellement manifeste aujourd’hui. Cette fois, les gens profitent du renforcement du régime de primes étatique pour sauter le pas. Nous observons en effet une très nette progression des ventes pour ce type de véhicules. Remarquons que cette hausse dépend fortement de la marque car certaines investissent davantage dans cette motorisation que d’autres. Certains constructeurs font aujourd’hui 50% de leurs ventes en électrique. Il est donc évident que l’électrique va percer, peutêtre même plus rapidement que ce que l’on pourrait imaginer. De là à affirmer que 2021 sera l’année de l’électrique ? Je ne sais pas. Tout dépendra de ces nouvelles primes qui, rappelons-le, sont conditionnées à une date d’achat avant le 31 mars 2021. Ce qui est sûr, c’est que 2021 sera l’année des nouvelles technologies et, surtout, du choix automobile. Il y a aujourd’hui un choix plus large que jamais auparavant, en termes de motorisation, de carrosserie, de technologies, etc.

Nous sommes véritablement dans une période charnière au niveau de la technologie et de la technique automobile

Les nouveaux véhicules semblent en effet de plus en plus intelligents. Quelles sont les technologies embarquées les plus plébiscitées actuellement ?

Je pense qu’il faut distinguer les systèmes qui concernent la sécurité de ceux qui touchent au confort. Les premiers – comme le système d’alerte de franchissement de ligne par exemple – tendent à devenir obligatoires au niveau de la réglementation européenne. Ils se développent donc forcément. Toutefois, ce qui intéresse beaucoup les utilisateurs, notamment les plus jeunes, a plutôt trait à la connectivité. Les écrans sont de plus en plus fréquents dans les véhicules. Ils donnent accès à des données directes comme les conditions météorologiques ou de circulation, des fonctionnalités qui se rapprochent fortement d’un smartphone. On constate vraiment une transposition du téléphone dans l’auto. Ce qui est remarquable, c’est que cela concerne toutes les gammes de véhicules. Aujourd’hui, une citadine peut proposer les mêmes éléments de confort et de connectivité qu’une voiture bien plus haut de gamme. Toutes ces nouvelles fonctionnalités rendent l’achat d’un nouveau véhicule (ou d’une voiture d’occasion très récente) très attractif.

Un mot à ajouter sur l’avenir du secteur ?

Ce n’est peut-être pas évident au premier abord pour un observateur externe, mais nous sommes véritablement dans une période charnière au niveau de la technologie et de la technique automobile. Il y a beaucoup de changements également dans les concessions qui évoluent, se regroupent, etc. De tels bouleversements entretiennent la passion du métier.

L’important à nos yeux est que l’automobile reste au centre de la mobilité à Luxembourg. Bien sûr, dans la mesure où nous tentons de construire des villes intelligentes, modernes et attractives, celle-ci se devra d’être beaucoup plus écologique et utilisée de façon responsable, en complément d’autres moyens de transport. Bus, train, tram, voiture, moto, vélo… tous ont leur place. L’atout de l’automobile restera bien sûr sa capacité à acheminer son usager exactement où il veut, quand il le veut.

Par A. Jacob