Syndicat des Eaux du Sud : continuité, sécurité, durabilité

Maillon essentiel de l’approvisionnement en eau potable dans le sud du Luxembourg, le Syndicat des Eaux du Sud s’engage pleinement dans des projets d’avenir pour concilier qualité, sécurité et durabilité. Entre modernisation des infrastructures, protection des sources, coopération avec le monde agricole et sensibilisation du public, le syndicat déploie une stratégie globale pour garantir un service indispensable aux habitants et aux entreprises de la région. Rencontre avec Frank Wersandt, son directeur.

Au fil de l’eau

Créé en 1908 avec pour mission d’assurer l’approvisionnement en eau potable des localités du bassin minier, confrontées à l’époque à une croissance démographique rapide due à l’essor de l’industrie sidérurgique, le syndicat des eaux du sud fut le 1er syndicat de communes au Luxembourg. À l’origine, onze d’entre elles s’unissent sous l’impulsion de Pierre Braun, commissaire de district et de Louis Klein, ingénieur-chef auprès des services agricoles de l’État. Ensemble, ils fondent le Syndicat de Communes pour l’Établissement et l’Exploitation d’une Conduite d’Eau intercommunale pour les Cantons de Capellen et d’Esch-sur-Alzette, renommé Syndicat des Eaux du Sud après la Seconde Guerre mondiale. Ce modèle de coopération intercommunale a posé les bases d’un service public essentiel à la vie des communes du sud du pays, qui n’a cessé de se développer sous une succession de présidents et de directeurs engagés.

« Avec aujourd’hui 22 communes membres et une superficie desservie de 406 km², nous assurons l’approvisionnement en eau potable de quelque 240.000 habitants, soit 37% de la population luxembourgeoise », déclare Frank Wersandt. Le syndicat distribue annuellement 15 millions de m³ d’eau et réalise un chiffre d’affaires de 28,5 millions d’euros, avec un tarif de 1,90 euros par m³ facturé aux municipalités membres.

Face aux pics et aux risques

Au-delà de sa mission historique, le syndicat doit aujourd’hui relever des défis complexes liés à la gestion de l’eau potable dans un contexte de croissance et de transition écologique. « L’un des enjeux majeurs concerne la gestion des pics de consommation. Nous distribuons en moyenne 40.000 m³ d’eau potable par jour, cette consommation peut dépasser les 60.000 m³ durant les mois d’été, notamment en juin et juillet. Pour faire face à cette demande accrue, nous disposons d’une capacité réservée de 35.500 m³ par jour auprès du Syndicat des Eaux du Barrage d’Esch-sur-Sûre (SEBES), en complément de nos propres sources », explique le directeur.

La protection des ressources en eau constitue un autre pilier essentiel. Depuis l’entrée en vigueur des règlements grand-ducaux concernant les zones de protection des sources, le SES met en œuvre une surveillance rigoureuse. Cela passe par l’analyse des risques, l’élimination des sources potentielles de pollution et la sécurisation des piézomètres qui permettent de contrôler l’état des nappes phréatiques. La vigilance est d’autant plus cruciale qu’une nappe polluée met environ 25 ans à se régénérer.

En tant qu’infrastructure critique, le SES est également engagé dans une démarche renforcée de cybersécurité. Avec le soutien de l’Institut Luxembourgeois de Régulation (ILR), il réalise des audits de sécurité, applique les recommandations issues de la directive européenne NIS2 et forme ses équipes aux meilleures pratiques pour protéger ses systèmes informatiques.

Un impératif de continuité de service s’impose également au syndicat : « face aux risques liés à des coupures de courant, nous devons par ailleurs garantir un approvisionnement autonome en eau potable pendant au moins 72 heures, conformément aux exigences nationales », ajoute Frank Wersandt.

Des projets pour aujourd’hui et demain

Depuis 2002, le syndicat a développé une collaboration étroite avec les agriculteurs de la région ainsi qu’avec la Chambre d’agriculture afin de préserver la qualité des ressources en eau tout en conciliant les activités agricoles. Cette coopération s’articule notamment autour de l’établissement de plans de fumure et d’un conseil agricole dédié, visant à activer le module de protection des eaux. Ces dix dernières années, ce dispositif a été renforcé grâce à l’intervention de partenaires spécialisés comme Convis et l’Institut pour l’agriculture biologique et la culture agraire au Luxembourg (IBLA), qui proposent des modules de conseil spécifiques adaptés aux enjeux locaux. En 2021, une étape importante a été franchie avec la signature de la coopération agricole de la Vallée de l’Eisch, rassemblant une soixantaine d’agriculteurs engagés dans une démarche responsable.

Chaque année, jusqu’à 180 ha de maïs sont ainsi cultivés selon ces pratiques encadrées. Pour optimiser les résultats tout en limitant l’impact environnemental, l’utilisation d’une fraise rotative et d’une herse étrille vient compléter ces mesures, améliorant la gestion des sols et réduisant le recours aux produits chimiques. Le SES investit également dans des cultures alternatives, comme le miscanthus, dont « la reprise des récoltes sera utilisée pour alimenter notre nouveau système de chauffage à Koerich », déclare Frank Wersandt. Par ailleurs, des projets pilotes explorent des alternatives au maïs dans les zones à haute vulnérabilité, avec l’implantation de sudangras, une plante fourragère cultivable sans usage de produits phytosanitaires. Un autre projet innovant concerne l’épandage de lisier mesuré à l’aide d’une sonde infrarouge, qui permet de connaître précisément la teneur en nutriments et la quantité épandue, optimisant ainsi la fertilisation tout en limitant les risques de pollution. Afin de lutter contre l’érosion des sols, des fascines en bois sont installées sur les terres agricoles situées en amont des zones sensibles.

Sur le plan de l’assainissement, le SES pilote plusieurs projets visant à éliminer les fosses septiques équipées de trop-pleins et à raccorder les habitations concernées au réseau collectif. Cette démarche vise à réduire les risques de pollution microbiologique de la nappe phréatique. Ces opérations sont menées en partenariat avec les syndicats d’assainissement et les communes et bénéficient parfois de subventions pouvant aller jusqu’à 75% du ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité. En parallèle, les anciennes citernes à mazout simple paroi sont progressivement supprimées pour éviter les fuites d’hydrocarbures, remplacées soit par des citernes à double paroi dotées de systèmes de détection automatique, soit par des installations de chauffage plus écologiques. « Nous avons déjà assaini 46 de nos 63 sources d’eau potable, avec deux projets en cours, notamment à la source de Waeschbour à Koerich, qui est en phase projet et celle de Stoltz à Dondelange, en phase de finalisation, notre objectif étant d’assainir toutes les sources d’ici 2035 », déclare Frank Wersandt.

Parmi les projets à venir figurent la rénovation des stations de pompage à Koerich et Dondelange, ainsi que l’étude pour l’installation de nouveaux châteaux d’eau dans les zones industrielles nationales, comme celle en cours pour la zone Robert Steichen. Un chantier majeur concerne également la construction d’une nouvelle conduite de distribution entre le Rebierg et Sanem, estimée à 20 millions d’euros et destinée à assurer une redondance technique avec la conduite existante. « Plusieurs conduites de distribution arrivant en fin de vie devront également être remplacées ou agrandies pour garantir un débit suffisant jusqu’aux réservoirs des communes desservies », ajoute le directeur.

Sensibiliser et informer

Le syndicat accorde une importance particulière à la sensibilisation du public sur les enjeux liés à l’eau potable. Conscient que la préservation de cette ressource dépend aussi de la responsabilité collective, il organise des visites guidées de ses installations. Celles-ci, ouvertes aux groupes scolaires, aux associations et aux entreprises, offrent un aperçu concret du fonctionnement du syndicat, de la captation de l’eau à sa distribution. Le parcours comprend plusieurs étapes : une présentation institutionnelle, la projection d’un film pédagogique et une visite sur le terrain. Les participants peuvent aussi découvrir les infrastructures techniques, une source d’eau et les réservoirs du site Rebierg.

En complément, le SES ouvre ponctuellement ses portes au grand public. La prochaine journée portes ouvertes est programmée au 20 septembre. Elle permettra à chacun de plonger dans l’univers de l’eau potable et de découvrir notamment l’exposition permanente Themaqua à Koerich. Conçue pour un public âgé d’au moins 12 ans, cette exposition interactive et didactique retrace le parcours de l’eau, de sa source jusqu’au robinet, en mettant l’accent sur les étapes de traitement, les enjeux de qualité, de sécurité et de durabilité. « À travers ces actions, nous souhaitons rappeler que l’eau est une ressource précieuse et que sa gestion passe aussi par une meilleure connaissance et un engagement de la part de tous », conclut Frank Wersandt.

Syndicat des Eaux du Sud
Fockemillen
L-8386 Koerich
www.ses-eau.lu