À la rencontre du monde agricole luxembourgeois
La Foire agricole d’Ettelbruck (FAE) a connu cette année une édition inhabituelle et encore fortement influencée par les restrictions liées à la pandémie. Obligée de limiter l’accès à 2.000 visiteurs simultanément sur le site, la Foire avait choisi de diffuser également un programme digital via différents médias (fae.lu, réseaux sociaux, RTL play, Post TV). À cette occasion, l’équipe organisatrice de l’événement a accepté de nous donner sa vision du monde agricole luxembourgeois et de sa transformation…
À l’occasion de cette nouvelle édition, quelles sont les tendances que vous avez remarquées parmi les exposants?
Face aux restrictions sanitaires, certains exposants étaient plus réticents, mais la majorité était confiante et souhaitait transmettre un message d’optimisme, sous le signe de la relance économique. 170 exposants ont profité de l’occasion pour renouer le contact avec leurs clients. Ils ont particulièrement apprécié la cohésion, la convivialité du secteur agricole et le soutien du consommateur. Les groupements, comme «machinisme agricole», ont souligné par leur présence l’importance de l’économie locale et régionale.
Au regard des participations à la Foire d’année en année, comment évolue selon vous la digitalisation du monde agricole luxembourgeois?
La digitalisation ne s’arrête pas devant les portes de nos fermes. Le coût élevé de la main d’œuvre au Luxembourg entraine une évolution plus rapide dans nos exploitations agricoles par rapport à d’autres régions. En coopération avec la Fédération des Entreprises du Machinisme Agricole et Industriel du Grand-Duché de Luxembourg (FEMAL) nous organisons régulièrement des démonstrations de machines innovantes à la FAE. Les centres de recherche ont également la possibilité d’y présenter leurs projets. Ceci s’harmonise parfaitement avec la philosophie du Partenariat européen pour l’Innovation agricole, basée sur l’échange des connaissances.
L’agriculture de précision sur les champs est par ailleurs devenue une réalité. Aujourd’hui les systèmes d’autoguidage fonctionnent avec une précision au centimètre près, ce qui permet une facilitation du travail et une réduction des intrants. Il est désormais possible de réaliser le désherbage mécanique par un binage entre les rangs; ainsi l’utilisation d’herbicides peut être diminuée sensiblement. La mesure géo-référencée du rendement en combinaison avec l’analyse du sol permet de cibler l’apport des amendements et fertilisants. L’augmentation des performances ne s’oppose donc pas forcément à la protection de l’environnement. Parmi d’autres exemples démontrant l’avantage de la digitalisation sur l’impact environnemental, le modèle de prévision des maladies phytosanitaires permet au céréalier de savoir si le traitement fongicide peut être évité en cas d’évolution météorologique favorable.
Le coût élevé de la main d’œuvre au Luxembourg entraine une digitalisation plus rapide dans nos exploitations agricoles
Le robot de traite a quant à lui fait son entrée dans les exploitations laitières depuis longtemps. Des capteurs d’analyse de lait, de pesage ou de mouvement permettent de faire un bilan sur l’état de santé et le bien-être d’une vache. Parmi les avantages de la robotisation, on note la réduction du temps de travail, le bien-être animal, l’augmentation du rendement laitier, la traçabilité et enfin l’augmentation de la qualité du lait.
Le secteur de l’agriculture fait face à des réglementations environnementales toujours plus strictes. Comment cela se traduit-il dans les stands de vos exposants?
Plus que jamais la qualité des produits est garantie aussi bien en agriculture conventionnelle que biologique. Notre situation géographique, au centre de la ceinture verte, et le savoir-faire de nos éleveurs laitiers a mené au développement de ce secteur, qui représente la filière la plus importante de l’agriculture luxembourgeoise. Les laiteries travaillent en étroite collaboration avec les producteurs dans le souci de garantir une sécurité alimentaire maximale par le traçage et une transparence absolue.
Le conseil agricole dispose d’un énorme réservoir de données régulièrement mises à jour. Leur analyse permet d’évaluer les performances environnementales, économiques et sociales des différents ateliers d’une exploitation. À la FAE les conseillers ont l’occasion de rencontrer les agriculteurs, mais aussi les citoyens-consommateurs; c’est une opportunité de transmettre un message de confiance et d’être à l’écoute des attentes sociétales. Parmi nos exposants nous comptons également les ministères qui informent sur les nouvelles réglementations.
La pandémie a-t-elle eu selon vous une influence sur les habitudes de consommation des Luxembourgeois?
Nous observons une tendance à la consommation de produits régionaux depuis quelques années. La pandémie a poussé beaucoup de consommateurs à s’intéresser davantage aux produits locaux et les producteurs se sont réjouis d’une croissance de la vente directe à la ferme. Grâce à ce contact direct, le producteur peut donner confiance au consommateur averti en lui expliquant ses modes de production et en lui faisant visiter son exploitation. Même si l’euphorie a ralenti, la vente directe reste nettement supérieure par rapport à l’époque d’avant l’épidémie de Covid-19.
Pour les consommateurs gourmets, la FAE est non seulement l’occasion de découvrir des nouveautés du terroir, mais aussi de rencontrer les producteurs qui exposent leur savoir-faire en vitrine ou proposent une dégustation. L’authenticité est bien plus importante que le «story telling» des experts de communication des multinationales!
Par M. Cappuccio