AMSTERDAM, LA VILLE INTELLIGENTE PARTICIPATIVE

En arpentant les rues d’Amsterdam à pied ou à vélo, en longeant les canaux et en empruntant les ponts qui relient les rives les unes aux autres, un sentiment de quiétude nous envahit. Malgré la densité démographique, Amsterdam ne donne pas le sentiment d’écraser l’individu. Pourtant, la Venise du Nord, avec ses canaux majestueux, ses musées réputés et ses péniches paisibles, doit lutter pour sa survie contre la montée des eaux. Ce combat permanent a forgé la personnalité d’Amsterdam et le caractère de ses habitants. La solidarité ici n’est pas un vain mot, c’est un état d’esprit. Chacun est conscient de la nécessité d’établir un réseau de communication performant entre toutes les parties prenantes de la société. Cet état d’esprit collectif, combiné aux nouvelles technologies, est pour beaucoup quant au succès du concept de la Smart City à Amsterdam.

Amsterdam, la capitale des Pays-Bas, a été l’une des premières capitales européennes à épouser le concept de ville intelligente. Adoptant une stratégie globale dès 2009, cette ville est devenue en dix ans l’incarnation même de la Smart City. En 2016 elle a été désignée, Capitale européenne de l’innovation par la Commission européenne. L’approche holistique basée sur un concept à quadruple hélice (gouvernement, entreprises, citoyens et universités et instituts de recherche) est la structure sur laquelle se base Amsterdam pour la création d’une ville intelligente. La métaphore de l’hélice symbolise des secteurs d’activités interconnectés et imbriqués les uns aux autres. Alors que dans le modèle de la triple hélice, l’existence d’une démocratie n’est pas nécessaire en soi pour la production de connaissances et pour l’innovation, celui de la quadruple hélice montre clairement qu’il ne peut y avoir de système d’innovation sans démocratie ou environnement démocratique. La participation des citoyens dans le processus d’innovation est la condition nécessaire pour pouvoir parler d’un véritable modèle à quadruple hélice, ce que la capitale néerlandaise semble avoir intégré dans sa démarche.

Une stratégie globale et holistique

Amsterdam a adopté une méthodologie ascendante basée sur la croissance intelligente, les startups, l’inclusion sociale et la qualité de vie. L’approche de la ville couvre tous les domaines d’action pertinents pour une municipalité. Les avantages d’une gouvernance et de données ouvertes pour accélérer les progrès vers une ville plus intelligente ne sont plus à démontrer. Après un inventaire des archives locales de plus de trente départements de la ville, le projet City Data Amsterdam a vu le jour. C’est une base de données ouverte comprenant des données topographiques, des informations sur la valeur foncière et la propriété, des données de santé, ou sur le trafic, etc. A cette base de données de la ville sont venues s’ajouter les contributions d’autres institutions publiques et privées ainsi que la participation des citoyens. La plateforme en ligne « Amsterdam Smart City » est née. Elle est au cœur de l’approche stratégique de la ville. Son rôle consiste à centraliser et à coordonner les initiatives et les idées, pour faire rencontrer les partenaires potentiels sur un projet d’intérêt général. Le partenariat fonctionne en circuit ouvert. Un projet peut être porté par différents intervenants issus de différents secteurs de la vie active. Fonctionnant comme un réservoir d’idées, « Amsterdam Smart City » facilite la vérification des idées et leur mise en oeuvre. Dès qu’un projet a fait ses preuves à une petite échelle, il est transposé sur une zone plus importante.

Les six piliers de la Smart City

L’écosystème voulu par la plateforme « Amsterdam Smart City » se compose de six thèmes qui constituent les axes sur lesquels la ville travaille en priorité, toujours avec la participation active des citoyens et des autres parties prenantes. A ce propos, la mobilité est un thème crucial pour le bon fonctionnement d’une ville. Amsterdam est considérée à juste titre comme la capitale mondiale du vélo. Pas moins de 32% du trafic intramuros se fait à vélo et 63% des habitants utilisent la petite reine au quotidien. Le nombre de propriétaires de voitures électriques a augmenté de 53% pour atteindre près de 29 000 unités en 2016. Depuis 2008, l’autopartage a connu un bon spectaculaire de 376%. Néanmoins, cela ne constitue que 1% du trafic automobile de la ville. Beaucoup reste à faire et la plateforme ne cesse d’inciter les habitants à devenir une force de proposition.

D’autre part, une ville intelligente ne peut exister que si elle est capable d’attirer et de capter les compétences. Grâce à ses deux universités et à 21 universités régionales en sciences appliquées, 40% des habitants de la ville sont hautement qualifiés. Le département de l’innovation de la municipalité collabore étroitement avec les différents services de la ville pour l’encourager dans sa transformation. Avec plus de 900 startups, les décideurs politiques de la ville mettent tout en oeuvre pour offrir des outils performants en termes de moyens et d’infrastructures au service de l’innovation.

Le digital est un autre thème majeur de la ville intelligente. Entre 2014 et 2015, le trafic internet à Amsterdam a connu une croissance de 27%. En 2016, la ville s’est classée deuxième dans le « European Digital City Index ». Le volet de l’énergie n’est pas en reste. La capitale néerlandaise ambitionne, dans le futur, de faire de chaque citoyen un fournisseur d’énergie propre grâce au photovoltaïque. En outre, la ville s’est reconvertie à l’économie circulaire pour limiter le gaspillage et réduire la pollution en adoptant une politique de recyclage ambitieuse. La compagnie d’électricité de la ville d’Amsterdam produit 900 KWh par 1000 kg de déchets. Près de 75% des eaux usées sont traitées et les résidus servent à produire du gaz naturel, par exemple. Grâce à la revalorisation des déchets, la ville pourrait générer 85 millions d’euros par an dans le secteur de la construction et 150 millions dans le recyclage de résidus organiques.

La participation citoyenne au service de la ville

Ainsi, toutes les parties prenantes se regroupent autour de ces thèmes principaux : infrastructure et technologie, énergie, eau et déchets, mobilité, ville circulaire, gouvernance et éducation et enfin citoyens et vivants. A ce jour, la plateforme regroupe des milliers de membres actifs et porte des centaines de projets collaboratifs visant à améliorer continuellement la qualité de vie et la prospérité d’Amsterdam. Un tel engagement et des réseaux de soutien efficaces fournissent une base solide pour le pilotage d’idées et de projets innovants, ce qui conduit à la formation d’un écosystème complet de solutions pour une ville intelligente. Pour renforcer davantage l’attractivité d’Amsterdam, la municipalité compte sur l’implication de ses citoyens. En plus du recours aux nouvelles technologies et à l’innovation, la contribution des habitants est la pierre angulaire de la ville intelligente participative. La plateforme « Amsterdam Smart City » est un partenariat unique entre investisseurs, autorités locales, institutions de recherche et développement et citoyens de la ville. Les résidents ont un rôle central dans tous les projets et initiatives portés par la ville. En dix ans d’existence, la plateforme « Amsterdam Smart City » a su créer un tissu actif de plus d’une centaine de partenariats et a porté pas moins de 70 projets innovants.

Par R. Hatira