DE GRANDE RÉGION À « SMART RÉGION »
Constituée de la Sarre, de la Rhénanie- Palatinat, de la Lorraine, de la Wallonie et du Grand-Duché de Luxembourg, la Grande Région a été institutionnalisée en tant qu’espace de coopération transfrontalière lors de la création du premier sommet de la Grande Région en 1995. Corinne Cahen, ministre de la Famille et de l’Intégration et à la Grande Région, présente cette dernière entité, mais aussi les initiatives mises en place pour faire de ce territoire une place forte et un exemple à suivre au sein de l’Union européenne.
Quels sont les objectifs et les aspirations du ministère à la Grande Région ?
Le ministère à la Grande Région possède un rôle de facilitateur, il touche à differents domaines qui se trouvent dans les attributions d’autres ministères, comme l’éducation, les transports, l’économie ou encore le tourisme. Son existence démontre l’importance que donne le Luxembourg à la Grande Région. S’il permet d’effectuer un lien entre nos différents ministères nationaux, il sert aussi de relais pour nos autres voisins à savoir la France, la Belgique et l’Allemagne ; l’objectif étant d’améliorer la coordination et la coopération transfrontalière entre tous ces acteurs.
Les citoyens ont également leur propre lieu de rencontre et d’échange au sein de la Maison de la Grande Région, située à Esch-sur-Alzette. Celle-ci regroupe neuf entités en charge de la coopération transfrontalière. Le Grand-Duché de Luxembourg a eu la présidence de la Grande Région durant deux ans, en 2017 et 2018. Cette année, c’est au tour de la Sarre avec Tobias Hans, le ministre-président du Land, d’assurer cette fonction.
Justement, quelles ont été les grandes lignes de votre présidence ?
Être plus proche des citoyens et de leurs préoccupations ! Durant notre présidence, nous avons accordé énormément d’importance aux jeunes en les faisant participer à un certain nombre de projets, comme des échanges au niveau scolaire, des ateliers communs avec des classes sur différents thèmes,… Le 9 mai 2018, lors de la Fête de l’Europe, nous avons par exemple organisé une journée avec 300 jeunes qui ont pu échanger sur l’avenir et les défis de la Grande Région. Des hommes et des femmes politiques étaient présents et ont écouté leurs doléances car ce sont les jeunes d’aujourd’hui qui seront les acteurs de la Grande Région dans les années à venir.
Les jeunes que nous avons rencontrés ont conscience de leur chance et des opportunités offertes par l’Europe. Malgré tout, les défis sont les mêmes que partout ailleurs : chômage, logement, digitalisation,… Il est important pour nous que les jeunes se rencontrent. La Grande Région est en quelque sorte un laboratoire européen.
La Grande Région est un laboratoire européen
A-t-elle pour vocation de devenir un « exemple » à suivre ?
Ce territoire est composé des pays fondateurs de l’Union européenne, nous pouvons montrer que des initiatives transfrontalières sont possibles, et qu’il est tout à fait envisageable de les réaliser à une échelle plus grande et vraiment européenne. Le Brexit, le repli sur soi de la Hongrie,… malheureusement nous connaissons des mouvements anti-européens et ces derniers exemples vont à l’encontre de notre vision de l’Europe. Notre objectif est effectivement de prouver qu’une Europe basée sur la coopération est tout à fait possible.
La Grande Région est un espace idéal car nous pouvons travailler et collaborer ensemble, le tout à taille humaine. La Chambre de Commerce y est particulièrement active par exemple. Nous pensons aussi à l’Université de la Grande Région, qui comprend six campus répartis sur quatre pays et qui pourrait devenir la première université européenne. Les échanges entre les étudiants, mais aussi le multilinguisme, sont ainsi favorisés. Apprendre une langue, ce n’est pas seulement pouvoir communiquer, c’est aussi comprendre la culture, la façon de penser, respecter l’altérité… C’est ce qui a d’ailleurs toujours été une grande force des Luxembourgeois.
Notre coopération transfrontalière fonctionne, et si les autres pays perçoivent qu’un territoire comme la Grande Région est bénéfique pour tout le monde, des citoyens aux entreprises, alors ils s’inspireront peut-être de notre exemple.
Voyez-vous la Grande Région comme une « Smart Région » dans les années à venir ?
C’est mon souhait. Beaucoup de partenaires et de villes travaillent ensemble en ce sens. Il faut savoir qu’une « Smart Région » n’est pas uniquement basée sur la technologie, mais sur toutes les problématiques quotidiennes : la mobilité, les communications, la santé, l’industrie, l’environnement, l’économie circulaire etc. Nos défis sont communs, en témoignent les différents projets INTERREG.
Car toutes ces préoccupations ne s’arrêtent pas aux frontières. L’introduction de la gratuité des transports en commun au Luxembourg, par exemple, va forcément impacter les pays voisins et donc les travailleurs frontaliers. La Grande Région se doit d’être mobile et non pas immobile. Il faut être proactif et constructif dans ces discussions pour trouver des solutions et nous ne pouvons le faire qu’en coopérant. Le ministère des Transports a par exemple mis en place la stratégie pour une mobilité durable, MoDu 2.0, et celle-ci englobe la dimension transfrontalière.
Je pense également aux centres de recherche qui collaborent autour de plusieurs thématiques, comme la santé ou l’intelligence artificielle. J’avais par exemple remis un prix pour récompenser un groupe de chercheurs grand-régional sur la maladie de Parkinson. Ils ont mutualisé leurs forces et leurs moyens au lieu d’effectuer leurs recherches chacun de leur côté. La Grande Région est ainsi un facilitateur qui a pour objectif de créer des synergies entre ses habitants mais aussi les différents secteurs d’activités.
INTERREG, pilote de la Grande Région
Favoriser la coopération territoriale, les échanges économiques et sociaux, voilà les principaux objectifs du programme INTERREG qui unit les quatre Etats membres qui composent la Grande Région. Celui-ci est construit autour de trois axes phares : l’emploi, le développement territorial et l’économie. Il soutient notamment des projets de coopération multilatéraux, comme l’éducation, la formation, l’environnement, le cadre et les conditions de vie ou encore l’attractivité de la Grande Région.
Par P. Birck