GENÈSE ET DÉVELOPPEMENT DE LA GARE MARITIME
Le site Tour&Taxis reprend vie. La Gare Maritime a été reprise en main après un abandon de plusieurs décennies. Aujourd’hui, tous les efforts se concentrent sur sa revitalisation et sa réintégration urbanistique dans Bruxelles. Leif Chiotis et Kurt Corvers, respectivement Branch Manager et Chief Operating Officer chez Boydens Engineering, reviennent sur le rôle de leur bureau d’études dans la conception de la Gare Maritime.
En quelques mots, quelles sont les activités de Boydens Engineering ?
LC : Boydens Engineering est un bureau d’études en génie technique. Fondé en Belgique en 1961, il possède aujourd’hui des bureaux au Vietnam, à Singapour, mais aussi au Luxembourg où nous sommes implantés depuis dix ans. En tant que bureau d’ingénieurs conseils actif dans la conception et le suivi des installations techniques du bâtiment, notre objectif est de fournir des conceptions durables et innovantes à chaque projet que nous traitons. Nos ingénieurs offrent ainsi des conseils en matière d’optimisation, d’extension ou de réingénierie future.
Parmi ces projets se trouve celui de la rénovation de la Gare Maritime à Bruxelles. Quelles ont été les étapes de développement pour parvenir à un bâtiment optimal, alliant durabilité, confort et conservation du patrimoine historique ?
KC : Il faut savoir que l’étude initiale a été réalisée sur base d’une autre architecture, mais c’est surtout l’approche qui nous a donné une assise de qualité afin que l’architecte puisse prendre les bonnes décisions. La Gare Maritime est un immense site de la capitale de par son histoire et sa taille. Nous avons ainsi travaillé sur plusieurs points pour obtenir un degré de confort élevé au sein d’un bâtiment que nous souhaitions durable.
LC : Extensa, le développeur immobilier qui travaille sur la revitalisation de la Gare Maritime, a eu le courage d’investir dans ce genre de projet en conservant la structure existante et les traces du passé pour en faire un bâtiment moderne et dynamique.
Un degré de confort élevé au sein d’un bâtiment que nous souhaitions durable
KC : Le confort englobe plusieurs paramètres: la température, la luminosité, la physique du bâtiment, l’acoustique, mais aussi le programme du client. L’architecte Willem Jan Neutelings a imaginé la Gare Maritime comme une ville couverte. Elle est ainsi composée d’un hall central avec différents volumes qui contiennent des bureaux, des commerces, des restaurants,… ; le tout, au sein d’une enveloppe qui n’est autre que la structure du bâtiment. Nous avons ainsi étudié plusieurs options et douze cas ont été retenus. Chacun d’eux combinaient plusieurs solutions différentes : hall ni ventilé ni chauffé, hall chauffé mais où l’air des bureaux est expulsé vers celui-ci, une autre option où le hall est chauffé,… Nous avons réalisé plusieurs calculs et simulations pour trouver la meilleure solution en matière de confort et de consommation énergétique.
L’option du hall chauffé a été très vite écartée. Nous avons donc opté pour une isolation très performante de l’enveloppe de la Gare Maritime, combinée à des solutions d’isolation moins performantes pour les volumes en bois qui se trouvent à l’intérieur. Nous avons également étudié la ventilation naturelle avec des ouvertures de 600 mètres carrés en toiture et 480 mètres carrés en façade. Les automatiser reste assez onéreux mais l’investissement est vite rentabilisé puisqu’elles sont également utilisées pour le désenfumage.
Quelles ont été les autres décisions et options prises en matière de chauffage ou de ventilation ?
LC : Nous avons ajouté des lucarnes dans les rues intérieures ce qui permet aux blocs de recevoir plus de lumière naturelle. Le climat à l’intérieur de la Gare Maritime reste relativement agréable surtout dans le cadre d’un édifice avec une telle superficie (4 ha). Nous jouons simplement sur la ventilation naturelle, comme c’est le cas pour le bâtiment Herman Teirlinck qui se trouve lui aussi sur le site de Tour&Taxis.
KC : Pour résumer, la Gare Maritime se divise en plusieurs zones. En dessous des toitures, il n’y a pas de plafond. La climatisation est réalisée par un convecteur de sol motorisé qui peut aussi bien chauffer que refroidir. Sur celui-ci, nous avons connecté l’air frais pour les différentes zones. La régulation se fait automatiquement puisqu’il est raccordé à une sonde de qualité d’air qui règle le débit en fonction de l’occupation de la zone. Par ailleurs, chaque volume est équipé de sa propre centrale de ventilation avec du froid adiabatique où l’eau de pluie est utilisée pour refroidir l’air. Celleci est également équipée d’une pompe à chaleur pour les périodes caniculaires. Nous avons enfin privilégié le plafond rayonnant pour les zones composées d’un faux plafond.
LC : Le bâtiment n’a recours à aucune énergie fossile, il est sans émission. Tout est réalisé par la géothermie et par des pompes à chaleur qui se trouvent dans chacun des volumes. En quelques sortes, ces derniers sont organisés en réseau de chaleur pour pouvoir s’échanger l’énergie.
L’un de nos collaborateurs, ici à Luxembourg, est spécialisé dans le photovoltaïque. Nous avons donc réalisé des études pour installer l’énergie solaire dans la Gare Maritime et aider le maître d’ouvrage à choisir la meilleure option en fonction de l’investissement, de la rentabilité, des subventions et des différents panneaux photovoltaïques à disposition. La façade sud qui donne sur la rue Picard intégrera par exemple la technologie BIPV (Building-Integrated Photovoltaics) dans le vitrage.
Un nouveau lieu de vie dans Bruxelles
KC : Une protection solaire extérieure est nécessaire et, traditionnellement, nous utilisons des stores. Or, ce n’était pas très esthétique sur un bâtiment comme celui-ci. Nous avons découvert le vitrage intelligent Halio d’AGC Glass Europe qui peut changer la valeur G du facteur solaire (de 65% à 3%) et la transmission lumineuse en fonction de l’énergie solaire extérieure. Cette technologie reste pour autant encore très onéreuse et seulement les deux façades extérieures seront équipées de ce vitrage intelligent.
Qui dit rénovation, dit forcément économie circulaire. Qu’en est-il au niveau de ce bâtiment ?
LC : C’est d’abord très remarquable d’avoir effectué tant d’efforts pour conserver la structure, à savoir le bois et l’acier. Nous avons évité au maximum l’utilisation du béton. A part les dalles sur lesquelles reposent les blocs, nous n’y avons pas eu recours. Les processus de construction sont eux aussi plus durables avec l’utilisation du bois et de préfabriqués. Nous constatons ainsi beaucoup moins de déchets sur le chantier.
Un dernier mot sur la Gare Maritime ?
KC : Un tel site doit être pensé autour d’un projet de mobilité viable. Le tramway y sera intégré, et nous espérons que la station de métro Sainctelette, qui est toujours fermée, ouvrira ses portes une fois le projet réalisé. Bruxelles est l’une des capitales européennes les plus engorgées. La mobilité représente ainsi un enjeu énorme pour l’attractivité de la Gare Maritime.
Le bâtiment n’a recours à aucune énergie fossile, il est sans émission. Tout est réalisé par la géothermie
LC : Cette ancienne friche sera un nouveau lieu de vie dans Bruxelles. Un tel bâtiment, qui a plus de 100 ans et qui parvient à allier confort et durabilité, est une belle référence pour Boydens Engineering. De plus, la collaboration avec l’architecte Willem Jan Neutelings a été très productive. Son ouverture d’esprit et ses idées novatrices permettent aujourd’hui à la Gare Maritime de retrouver un seconde jeunesse tout en donnant un aspect urbanistique différent et original à la capitale.
Boydens Engineering
29, rue Henri Koch
L-4354 Esch-sur-Alzette
www.boydens.lu