L’ÉNERGIE SOLAIRE À L’HEURE DES AMBITIONS
Deux grands parcs photovoltaïques s’installent à Beidweiler et Junglinster. Le projet porté par Enovos et RTL Group représente les ambitions du Grand-Duché en matière d’énergies renouvelables. Explications avec Eugène Muller, Head of Technical Services & Transmissions à Broadcasting Center Europe.
RTL Group a entrepris la construction de deux grands parcs photovoltaïques sur le site de ses émetteurs à Beidweiler et Junglinster. Quelles sont vos motivations ?
L’énergie renouvelable est la direction à prendre pour l’avenir. Nous sommes fiers de bientôt pouvoir présenter la plus grande installation solaire au sol du pays. En plus de soutenir la politique écologique du gouvernement luxembourgeois en matière de production d’énergie renouvelable, ce projet sera également un excellent exemple de collaboration entre différents partenaires pour apporter une contribution importante au changement climatique.
Pourquoi avoir choisi d’installer ces deux parcs à Beidweiler et Junglinster ?
Les sites de transmission de Beidweiler et Junglinster sont des sites industriels. Pour des raisons de sécurité et en raison du câblage dense existant dans le sol, ces sites ne peuvent pas être exploités pour le développement urbain ni transformés en terres agricoles pour cultiver des aliments. Les deux sites sont donc parfaits pour accueillir des panneaux solaires et répondre aux exigences strictes de l’appel d’offres du gouvernement.
Quelles seront leurs caractéristiques techniques et quelle sera leur production d’énergie respective ? Combien de foyers pourront-ils alimenter ?
L’installation à venir devrait permettre de produire un volume important de près de 7 000 mégawattheures (MWh) par an, soit l’électricité verte nécessaire pour alimenter environ 1 800 foyers. Le nombre de panneaux installés à Junglinster s’élèvera à 7 161 et Beidweiler en accueillera 16 128. La production annuelle d’énergie estimée à Junglinster attendra 2 210 MWh (soit assez d’électricité pour alimenter 561 foyers) et Beidweiler : 4 900 MWh (1 244 foyers). L’électricité produite sera injectée dans le réseau national exploité par Creos.
Quel a été le rôle de chacune des parties prenantes dans ce projet (gouvernement, commune, Enovos et RTL Group) ?
Enovos et RTL Group avaient déjà identifié par le passé le potentiel d’un projet solaire commun de grande envergure. Le gouvernement, par sa politique énergétique, avait mis en place courant 2018 un environnement propice pour la réalisation et l’exploitation de grandes centrales de production solaires de plus de 500kWc au Luxembourg à travers son premier appel d’offres.
Par la suite, Enovos et RTL Group se sont associés par l’intermédiaire de la société commune HELIOVOS S.A. afin de répondre à l’appel d’offres en vue de développer et d’exploiter le projet commun après attribution.
La commune a contribué efficacement par la délivrance de toutes les autorisations nécessaires en coordination avec les ministères impliqués pour les différents volets techniques et environnementaux.
Comment ce projet s’intègre-t-il dans le plan climat et énergie du gouvernement ?
Afin d’atteindre les objectifs climatiques de l’UE d’ici 2020, le Luxembourg est en train d’accélérer son passage aux énergies renouvelables en renforçant la place de l’éolien et du photovoltaïque. L’objectif est que 11% de la future production d’énergie du pays provienne d’énergies renouvelables.
Avez-vous pour ambition de poursuivre sur cette lancée à l’avenir ?
Oui. Ce type de parcs solaires de plusieurs MW nécessite une qualification approfondie et une formation spécifique pour garantir un fonctionnement sans encombre des installations en plus d’une fiabilité maximale au cours des prochaines décennies. Nos équipes sont donc formées pour garantir la pérennité des installations et – éventuellement – être prêtes à accueillir une extension du parc solaire.
Ces collaborations entre différents partenaires (POST, Cactus, RTL Group…) en matière d’énergies renouvelables constituent-elles la marche à suivre pour lutter contre le changement climatique ? Quelles peuvent être, selon vous, les autres solutions pour y contribuer ?
Pour le développement économique futur du pays, et en vue de sa croissance, la consommation et la production énergétique feront partie des vecteurs les plus importants dans un contexte de changement climatique. J’aime l’idée de « think global – act local », et des modèles de « green business ».
Une Smart City comporte notamment des aspects environnementaux et durables, comment voyez-vous l’évolution des énergies renouvelables de façon générale et au Luxembourg ?
A mon avis l’efficacité d’utilisation de l’énergie couplée à de nouveaux modes de vie et de travail seront essentiels pour utilisation plus rationnelle et pointue de l’énergie en général. Il ne suffit pas, à mon sens, de remplacer un porteur énergétique (fuel, gaz, nucléaire) par un autre (solaire, éolien, etc.) pour devenir plus durable lorsque l’on conserve un environnement politico-socio-économique statique.
Je pense que le Luxembourg, au vu de sa petite taille comparée aux autres nations européennes, sera toujours dépendant d’une certaine façon de l’empreinte de l’environnement économique et social de ses voisins. En revanche, grâce à la réactivité politique et régulatoire du pays, le Luxembourg se prête très bien à la démonstration de modèles locaux efficaces pour l’utilisation et la production des énergies renouvelables.
Le Luxembourg est en train d’accélérer son passage aux énergies renouvelables
Quelle est votre vision de la ville de demain ?
Pour que la ville de demain puisse subsister, le modèle de vie et de travail devra changer. Il faudra éviter dans le futur les allers et retours quotidiens de centaines de milliers de travailleurs et employés (particulièrement pour le Luxembourg) sur des distances moyennes avec tous les effets de congestion que l’on connaît autour des pôles économiques à très haute concentration.
Avec l’avènement de la digitalisation et des technologies de communication de pointe, pourquoi concentrer les centres de développements économiques et éducatifs dans des villes ou très proches des villes ? Les activités économiques futures à forte valeur ajoutée pourront très bien s’implanter en dehors des villes, tout en restant proches des centres économiques existants.
Enfin, pourquoi ne pas faire évoluer la façon de se déplacer, aujourd’hui très individuelle, afin de rationaliser les transports et donc l’utilisation des infrastructures ?
Propos recueillis par P. Birck