Mobilité: un plan pour 2035

Entre 2017 et 2035, le trafic routier devrait augmenter de 40% dans le cas de figure d’une croissance moyenne de 3%. Les voies principales déjà fortement saturées ne pourront plus accueillir l’important flux constaté aux horaires de pointe. Le Plan National de Mobilité mis en place est là pour répondre à cette urgence.

L’enquête Luxmobil 2017 confirme la situation tendue des routes du pays et plus particulièrement des voies qui conduisent aux pôles d’attraction économique, la ville de Luxembourg en premier lieu. Celle-ci tend à empirer malgré les diverses stratégies employées pour endiguer ce phénomène. La rançon du succès économique, diront certains. Une problématique qui exige des solutions estime le gouvernement qui développe un plan sur base d’une extrapolation de la croissance moyenne de 3% à l’aube de 2035.

Les projections établies par cette étude tablent sur 2,8 millions de déplacements individuels et par jour en 2035 contre 2 millions en 2017. Pour la seule ville de Luxembourg, qui est et restera vraisemblablement le principal pôle d’attraction du pays et de la Grande Région, 592.000 entrées et sorties de personnes par jour sont estimées (contre 420.000 en 2017).

En cela l’organisation du flux au sein de la ville de Luxembourg représente le premier défi de cette étude.

Les usagers souhaitent avant tout bénéficier d’une offre diversifiée et, surtout, de qualité

Les déplacements intra-agglomération ne sont pas en reste puisque la ville de Luxembourg et sa ceinture suburbaine passeront de 491.000 déplacements à 686.000 soit 195.000 mouvements de plus par jour. L’accroissement sera aussi notable à Esch-sur-Alzette (+ 157.000 par jour) et à la Nordstad (+ 23.000 par jour). Cette mobilité urbaine devra s’orienter vers les transports en commun, le vélo et la marche à pied tout en permettant aux résidents d’accéder en voiture à leur lieu de vie.

Les secteurs ruraux couvrant 83 % du territoire national connaîtront en 2035 quelque 657.000 déplacements par jour sans lien avec les trois pôles d’attraction que sont Luxembourg-Ville et sa couronne, Esch-sur-Alzette ou la Nordstad. Les grands axes qui les traversent (autoroutes et lignes CFL), souvent surchargés aux heures de pointe, devront être allégés. Pour y parvenir, le plan de mobilité prévoit de développer des arrêts attractifs pour les différents transports en commun; arrêts planifiés plus principalement auprès d’institutions d’importance nationale, d’entreprises qui emploient un nombre important de travailleurs frontaliers ou encore à proximité de lieux de résidence pour employés des agglomérations majeures.

Des axes de travail définis

De manière générale, les usagers des transports en commun sont peu attachés à un mode de transport particulier. Ils souhaitent avant tout bénéficier d’une offre diversifiée et, surtout, de qualité. Les infrastructures sont en ce sens un élément important qui orientera l’usager vers un moyen de transport plutôt qu’un autre.

Dans les faits, 58% des résidents de moins de 60 ans ont fait usage du vélo en 2020 et l’étude révèle que les freins au déplacement en vélo sont justement liés aux problématiques d’infrastructures. L’augmentation de l’usage de ce mode de transport sera donc tributaire d’infrastructures cyclables de qualité.

L’étude met également en exergue les opportunités à même de permettre d’augmenter la capacité des transports en commun au travers notamment d’une meilleure exploitation des lignes CFL et du réseau de bus, d’une optimisation de la fiabilité des connexions, de la création d’accès cyclables, ceci plus nettement en milieu rural. Pour ce qui concerne les connexions intra et inter urbaines, les axes de travail s’orienteront vers la priorisation des bus sur les principaux axes routiers ou encore le développement des lignes du réseau de tramway dont l’extension «tram rapide» vers Esch-sur-Alzette et Belvaux.

Le covoiturage est une autre solution qui peut être favorisée par la mise en place de voies dédiées sur certains tronçons d’autoroutes.

L’objectif des parts modales pour 2035 se veut donc exigeant: l’usage de la voiture passerait à 31% (contre 51% en 2017) laissant une plus grande part aux autres moyens de transport, soit 22% pour le covoiturage, 22% pour les transports en commun, 14% pour la marche à pied et 11% pour le vélo.

L’intention est également de réduire la voiture en agglomération et dans les trajets de courte distance. Le plan de mobilité 2035 envisage ainsi que le nombre de passagers dans les transports en commun devra augmenter d’au moins 89% notamment grâce aux projets présentés ci-dessous.

Vers l’intermodalité des réseaux

Garantir un accès aisé, structuré et dense entre les différents modes de transport est indispensable dans l’optique d’atteindre les objectifs déclarés. Pour satisfaire ces exigences, des chaînes de mobilité seront mises en place afin de capter les flux importants par l’intermédiaire des pôles d’échanges et de connexions directes. D’autre part, le développement des P+R, en dehors des frontières aux sorties d’autoroute et à la périphérie des agglomérations auront vocation à diriger le flux des voitures vers les transports publics. En outre, les principaux arrêts de transports en commun devront être accessibles à vélo et ce en toute sécurité.

Pour y parvenir, le transport ferroviaire connaîtra une mutation qui visera à optimiser le temps de parcours et les offres entre les trois principales agglomérations. Des arrêts ferroviaires seront rajoutés, déplacés et/ou modernisés. Les projets majeurs identifiés comprennent aussi bien la création d’un triangle ferroviaire entre la ligne reliant Pétange et Luxembourg et celle allant de Pétange à Esch-sur-Alzette que la transformation de la gare de Hollerich en un 4e pôle d’échanges CFL de la ville ou encore la modernisation complète de la ligne Nord, la création d’un pôle d’échanges CFL à Erpeldange-sur-Sûre avec P+R, le déplacement de l’antenne ferroviaire de la Nordstad et les regroupements des arrêts CFL de Belvaux en un pôle d’échanges avec le tram complété d’un corridor à haut niveau de service pour bus.

Les projections établies tablent sur 2,8 millions de déplacements individuels par jour en 2035 contre 2 millions en 2017

Le tramway continuera également à prendre de l’ampleur par l’ajout de la ligne 1 qui reliera la Cloche d’Or à l’aéroport, les extensions du pôle d’échanges de Hollerich jusqu’au pôle d’échanges Ouest, de la route d’Arlon jusqu’au pôle d’échanges Bouillon, de la route d’Esch jusqu’au pôle d’échanges Belvaux mairie et la création d’une deuxième ligne desservant les quartiers Laangfur et Kuebebierg au Kirchberg.

Concernant le réseau de bus, l’accent sera mis sur le développement de pôles d’échanges et de priorisations pour bus à l’entrée et dans les traversées des agglomérations. Des corridors à haut niveau de service pour bus seront également créés entre Diekirch et Ettelbrück, entre Audun-le-Tiche et le quartier des friches d’Esch-Schifflange ainsi qu’entre le pôle d’échanges A4 et Belvaux et entre le pôle d’échanges Raemerich et Schifflange. Enfin, à Luxembour-Ville, un corridor à haut niveau de service sera mis en place et connectera les pôles d’échanges de la Cloche d’Or, Howald, la Gare centrale et Héienhaff.

Enfin le réseau piétonnier sera pensé pour faire de la marche l’option la plus attractive pour les déplacements de courte distance. Pour ce faire, des itinéraires piétons agréables et sécurisés seront intégrés dans tout projet de réaménagement ou de création de quartiers. Il en ira de même pour le réseau cyclable qui se devra d’être continu vers les destinations majeures, sans avoir à passer en trafic mixte avec piétons et véhicules.

Gageons que ces projets faciliteront les déplacements de tous  ; du résident au visiteur en passant, évidemment, par le travailleur.

Par J.-M. Streit