NEUTELINGS RIEDIJK ARCHITECTS, BÂTISSEURS D’IDENTITÉS
Fondé en 1987, le bureau d’architectes Neutelings Riedijk Architects a donné une identité forte aux paysages qu’il a façonnés depuis lors, habité par la volonté de marquer le développement urbain de sa vision durable et ouverte sur le monde. Entretien avec Willem Jan Neutelings, fondateur et partenaire de Neutelings Riedijk Architects.
Quelle est votre vision de l’architecture ?
Notre devise, « livrons à nos clients ce qu’ils demandent, mais pas forcément ce qu’ils attendent », est révélatrice de notre vision du métier. Cela signifie que nous analysons en profondeur le dossier et le lieu, et essayons ensuite de créer un concept architectural simple mais puissant, qui réponde aux exigences du projet mais qui génère aussi une valeur ajoutée pour la ville et la société. Pour chacun de nos projets, nous développons des matériaux et des détails spécifiques, collaborons avec des artistes pour intégrer des éléments d’art et des ornements, afin de créer des projets iconiques générateurs d’identité pour les utilisateurs du bâtiment et les habitants de la ville.
Comment percevez-vous l’évolution du métier ?
Nous voyons l’architecture comme la continuité d’un métier vieux de 5 000 ans. Nous pouvons apprendre beaucoup de toutes les villes prospères créées par les générations précédentes ; de même que des nombreux instruments traditionnels toujours précieux et utiles aujourd’hui. Nous considérons la transition intelligente comme une qualité plutôt que comme une innovation permanente. Trop souvent, l’innovation est utilisée comme un outil marketing où un gadget de courte durée est remplacé par le suivant. Toute personne impliquée dans un projet, du concepteur au client, devrait toujours s’interroger en premier lieu sur les valeurs et qualités à long terme à atteindre, non seulement pour le projet lui-même, mais aussi pour la société tout entière. Ce n’est qu’avec cet état d’esprit que se développent des concepts appropriés et des bâtiments dans lesquels il fait bon vivre et qui résistent à l’épreuve du temps.
Parlez-nous du projet dont vous êtes le plus fier.
Au fil des années, nous avons construit un certain nombre de bâtiments publics qui ont eu un impact important sur la vie urbaine et l’identité des villes dans lesquelles ils sont intégrés. Certains ont même généré un sentiment de communauté et de fierté chez les citoyens. Ces projets sont tous basés sur une même idée : celle de la prolongation du domaine public dans le bâtiment par la création de grands espaces publics intérieurs tels que des passages, des atriums ou des escaliers monumentaux. Ces espaces fournissent alors des itinéraires urbains où les gens peuvent se rencontrer et où toutes sortes d’activités informelles peuvent avoir lieu. C’est le prolongement de la vie urbaine dans le bâtiment lui-même.
Nous avons conçu de nombreux projets selon cette approche, comme l’Institut néerlandais de l’image et du son à Hilversum, les centres culturels de Rozet à Arnhem et d’Eemhuis à Amersfoort, l’hôtel de ville de Deventer et le centre Naturalis Biodiversity à Leiden qui ouvrira ses portes cette année. En Belgique, nous avons récemment développé trois projets sur ce principe : le Museum aan de Stroom d’Anvers, le bâtiment Herman Teirlinck à Bruxelles, et plus récemment, le projet de la Gare Maritime.
Comment avez-vous imaginé le projet Gare Maritime ?
La Gare Maritime, qui date du début du XXe siècle, était l’une des plus grandes gares de marchandises d’Europe. La question était de savoir comment donner une nouvelle vie à cet espace historique puissant, désaffecté depuis plus de trente ans. Avec Extensa, notre client et développeur du projet, nous avons imaginé le concept de la « ville où il ne pleut jamais ». L’idée est de restaurer la structure d’origine en acier et de construire sous celle-ci une ville ouverte sur Bruxelles. Nous avons donc créé un plan comportant douze blocs de construction intérieurs placés sous les arches et respectant le rythme de la structure existante. Il en résulte un plan de ville complet, avec des rues, des places et des espaces verts. Les trois nefs centrales sont laissées libres et ouvertes pour conserver la sensation d’espace qui régnait dans le bâtiment et pour créer un grand domaine public pouvant accueillir différents types d’événements. Les blocs sont construits entièrement en bois et préfabriqués pour s’imbriquer facilement dans la structure d’origine. Cela permet de bâtir rapidement, sans avoir besoin de couler du béton.
Quelles sont les principales mesures prises en termes de développement durable ?
Outre le choix des matériaux qui inscrit le projet dans le principe d’économie circulaire, la composition spatiale des nouveaux blocs intégrés est en elle-même très durable. Leur grande flexibilité leur permet d’accueillir toutes sortes de programmes et d’y apporter des changements à l’avenir, garantissant ainsi une longue durée de vie au bâtiment. Du point de vue énergétique, le concept de « bâtiments dans un bâtiment » permet une double isolation et l’utilisation des halls comme tampons climatiques, contribue à réduire les besoins énergétiques. Ceux-ci sont d’ailleurs satisfaits par des énergies renouvelables exclusivement.
Selon vous, que doit être une Smart City ?
Une ville intelligente est une ville soigneusement conçue, qui propose de bonnes conditions de vie à ses habitants et qui façonne une société inclusive et durable. Lors de la conception d’une ville intelligente, l’objectif ne devrait pas être de mettre en œuvre tout ce qu’il est possible d’élaborer, mais bien de déterminer ce que nous voulons réaliser. Lorsqu’on sait où l’on veut aller, on peut mettre en œuvre les bons moyens pour atteindre l’objectif. Ainsi, une ville intelligente n’est pas une simple superposition de technologies, mais un juste équilibre entre basse technologie et haute technologie, dans le cadre d’une stratégie globale de conception urbaine.
Par A. Jacob