VERS UNE CONCEPTION HOLISTIQUE DE LA CONSTRUCTION
Construire autrement, c’est possible. Olivier Vassart, CEO de Steligence, nouvelle division d’ArcelorMittal Europe, revient sur Steligence, cette philosophie de construction révolutionnaire qui mise véritablement sur l’optimisation et la durabilité des bâtiments.
Optimisation des bâtiments, utilisation raisonnée des matériaux,… Steligence couvre plusieurs aspects du secteur de la construction, pouvez-vous résumer cette méthodologie ?
Nous avons lancé Steligence en juin 2018 et cette initiative s’est concrétisée en novembre de la même année avec la création d’une nouvelle division au sein d’ArcelorMittal Europe. Pour autant, nous y réfléchissons depuis début 2015 au niveau de la recherche et développement. Nous avons réalisé une étude avec tous les acteurs de la construction afin de déterminer leurs attentes. De celle-ci ressort un mot: l’optimisation.
Sa définition dans ce secteur est différente selon les acteurs concernés. Elle peut être financière, environnementale, fonctionnelle,… Or, nous avons remarqué que l’optimisation ne s’exerçait pas sur le bâtiment en lui-même, mais sur ses parties de façon individuelle, à savoir la structure, le plancher, la façade, la ventilation,… Cette somme d’optimisation par gamme de produits ne donne pas de rendu final optimum. Jusqu’à maintenant, il n’existait que des méthodes individuelles. Avec Steligence nous avons développé une approche où le bâtiment devient une entité holistique globale, où tous les éléments qui le composent communiquent entre eux.
Comment fonctionne-t-elle concrètement ?
Cette solution nous permet de comparer les bâtiments dès leur conception et ainsi de réaliser plusieurs combinaisons possibles afin de trouver la méthode la plus adéquate en fonction de plusieurs paramètres. Pas moins de 17 indicateurs, qui sont scientifiquement et mathématiquement quantifiables, composent notre méthodologie, ils peuvent se diviser en trois familles. La première est économique et concerne, par exemple, le coût avant utilisation, sa phase de démolition, la vitesse du chantier,… La seconde est environnementale, où nous pouvons mesurer l’efficacité énergétique, la production ou non d’énergie renouvelable, la consommation en ressources naturelles en phases d’utilisation et de construction,… La troisième et dernière famille repose sur les impacts sociaux: confort thermique, acoustique et visuel, la qualité de l’air, la robustesse de la structure vis-à-vis d’événements non prévus tels que des tremblements de terre, l’architecture ou encore la flexibilité du design.
Une fois cette conceptualisation réalisée, nous nous sommes intéressés à l’ensemble du portfolio de produits qu’ArcelorMittal proposait. En interrogeant toutes les divisions du groupe, nous avons remarqué que l’offre de produits et de solutions de construction pouvait absolument tout couvrir. Nous nous sommes ainsi mis dans la peau d’un investisseur qui souhaitait réaliser un édifice classique pour des bureaux de huit étages et d’une longueur de 13,6 mètres. En analysant toutes les combinaisons envisageables de cette simulation, nous avons dégagé toutes les solutions possibles. Nous les avons ensuite intégrées dans notre méthodologie afin de retenir celles qui étaient les plus optimales.
Les bâtiments doivent interagir avec leur site urbain
Comment cela s’est-t-il traduit ?
Cette utilisation de l’acier a permis d’isoler dix bénéfices. Le bâtiment est par exemple moins haut, nous gagnons donc 11% du prix sur la façade, sur les cages d’escaliers ou encore les ascenseurs. Il est aussi relativement plus léger, ce qui permet de sauver 40% sur le coût des fondations car elles sont moins profondes. Son côté flexible lui permet également d’augmenter sa durée de vie puisqu’il est plus facile de le changer au niveau du design.
Il présente ainsi beaucoup d’avantages en termes de durabilité pour l’environnement. Avant même sa construction, nous analysons son cycle de vie et surtout sa fin de vie. Il ne faut pas parler de démolition mais bien de démontage. L’acier est beaucoup plus facile à démonter, à recycler et à réinjecter sur le marché en suivant le principe d’économie circulaire. Au final, le bâtiment que nous avons imaginé est 15% moins cher qu’une construction classique.
Ce concept holistique se présente-t-il comme une des solutions possibles pour l’avenir de la construction et de la ville de demain ?
Globalement oui, car les bâtiments doivent interagir avec leur site urbain. Lorsque l’on parle d’un bâtiment, il faut le penser d’un point de vue global, analyser l’environnement qui l’entoure, bref, voir le tout au moment présent, mais aussi dans le futur. En tant que société, nous ne pouvons pas continuer de construire les bâtiments comme nous l’avons toujours fait, en coulant des centaines de mètres cubes de béton sur tous les chantiers de façon déraisonnée. Ce n’est pas soutenable pour les matières premières et cela génère davantage de déchets. Il est ainsi nécessaire de repenser la façon dont les bâtiments sont conçus et construits pour les rendre plus flexibles, adaptables et respectueux de l’environnement. J’enseigne la structure mixte à l’université, l’acier et le béton excellent dans leurs propres zones de confort. En respectant leur nature, nous pouvons définir des concepts et des bâtiments qui donnent plus de sens. Celui qu’on a imaginé est en structure mixte, il a recours au moins de matériaux possible, mais il les exploite au mieux. Enfin, les infrastructures montent de plus en plus vers le ciel et l’acier aura un vrai rôle à jouer à l’avenir. Plus les constructions sont hautes et plus l’efficacité des solutions en acier sera grande.
Par P. Birck