Nouvel objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne pour 2040
En date du 6 février 2024, la Commission européenne a publié sa communication intitulée «Securing our future – Europe’s 2040 climate target and path to climate neutrality by 2050 building a sustainable, just and prosperous society».
Avec cette communication, la Commission présente ses recommandations concernant l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne à l’horizon 2040.
Partant de l’objectif d’une réduction nette des émissions d’au moins 55% d’ici à 2030 (par rapport à 1990), fixé par la «loi européenne sur le climat» (règlement (UE) 2021/1119), et en vue d’atteindre la neutralité climatique au plus tard en 2050, également inscrite dans la «loi européenne sur le climat», la Commission recommande une réduction nette des émissions de gaz à effet de serre de 90% d’ici à 2040 par rapport aux niveaux de 1990. Il s’agit d’un objectif domestique, à atteindre par l’Union européenne sur son propre territoire, sans recours à des crédits externes.
La communication se base sur l’avis du Conseil scientifique consultatif européen sur le changement climatique et est accompagnée d’une analyse d’impact détaillée de plus de 600 pages.
Mise en oeuvre du nouvel objectif
La communication de la Commission met en évidence que tous les principaux secteurs émetteurs de gaz à effet de serre devront contribuer aux efforts de réduction. En particulier, la consommation d’énergie fossile devrait diminuer d’environ 80% d’ici à 2040 par rapport à 2021. Selon la Commission, le captage du carbone moyennant des absorptions industrielles du carbone devrait être déployé de manière plus précoce, en complément des absorptions terrestres séquestrant le carbone dans la biomasse et les sols.
Outre les nombreux cobénéfices de l’action climatique, que ce soit en termes de qualité de l’air, de santé ou encore de création d’emplois, la fixation d’un objectif de réduction ambitieux à l’horizon 2040 offrira la prévisibilité nécessaire aux citoyens, aux entreprises et aux pouvoirs publics pour prendre dès à présent des décisions d’investissement et faire des choix politiques afin de préparer la transition vers la neutralité climatique.
Selon la Commission, les transformations au niveau sectoriel devront s’appuyer sur un cadre d’action approprié, constitué d’un ensemble adéquat d’incitations, de mécanismes de tarification et d’un environnement favorable pour faciliter les investissements privés et publics. Elle estime en effet qu’une part supplémentaire de 1,5% du PIB par rapport à la décennie 2011 à 2020, devrait être investie chaque année dans la transition, et qu’une mobilisation importante du secteur privé sera indispensable à cette fin. Le coût de l’inaction, supporté par nos économies, serait bien plus élevé.
De même, la Commission précise qu’une transition réussie nécessitera d’assurer la compétitivité de l’industrie européenne, notamment par des conditions de concurrence équitables avec les partenaires internationaux, et de veiller à ce que l’équité, la solidarité et les politiques sociales restent au cœur de la transition, qui doit être une transition juste.
Contexte global et national
À Dubaï, en décembre 2023, sur base du premier «bilan mondial», élément moteur de l’accord de Paris, la communauté internationale a souligné le besoin urgent de réduire les émissions de gaz à effet de serre et a entériné l’objectif de limiter le réchauffement global à 1,5° Celsius par rapport à l’ère préindustrielle. Pour ce faire, en s’appuyant sur les recommandations de la science (GIEC) de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 43% d’ici à 2030 (référence 2019), de 60% d’ici à 2040 et d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050, elle a envoyé un signal clair quant à l’abandon des énergies fossiles.
Alors que les objectifs de l’Union européenne en matière d’énergie et de climat pour 2030, y compris ceux du Luxembourg tels que reflétés dans le projet de Plan national intégré en matière d’énergie et de climat (PNEC), sont conformes à l’ambition arrêtée à Dubaï, il est entendu que les efforts en matière de décarbonation devront être accélérés au-delà de 2030, en route vers la neutralité climatique en 2050 au plus tard. Le nouvel objectif de l’Union européenne à l’horizon 2040 proposé par la Commission s’inscrit dans cette voie. À l’échelle nationale, les projections des émissions et absorptions de gaz à effet de serre établies dans le cadre de l’élaboration du projet de PNEC indiquent que le Luxembourg serait en mesure de réduire ses émissions nettes de l’ordre de 85% en 2040, comparé au niveau de 2005.
Suite des travaux
La communication de la Commission constitue une base de discussion pour le Conseil et le Parlement, ainsi que pour toutes les parties prenantes concernées. Sur base des réactions recueillies, il appartiendra à la future Commission (après les élections européennes) de mettre en avant une proposition législative pour fixer l’objectif 2040 (en l’inscrivant dans la «loi européenne sur le climat»), ainsi que de proposer un cadre législatif post-2030 pour mettre en œuvre cet objectif. Il est dès lors important de souligner que nous n’en sommes qu’au début du processus de préparation de l’objectif pour 2040.
Le programme de travail sous présidence belge du Conseil de l’Union européenne se présente comme suit: à partir du 12 février, des réunions techniques du groupe de travail environnement du Conseil permettront à la Commission d’exposer en détail sa communication (et les analyses d’impact correspondantes) et aux États membres de poser les questions pertinentes. Le dossier figurera à l’ordre du jour du Conseil environnement de mars (échange de vues) et de juin (débat d’orientation). Le Conseil européen sera également saisi, probablement pour se prononcer au niveau politique sur le niveau d’ambition général. En parallèle, le Parlement européen se penchera sur le dossier.
Les discussions des prochains mois ne se limiteront pas au simple chiffre de l’objectif de réduction, mais porteront par ailleurs sur les différents champs d’action et leviers nécessaires (à reprendre par la future Commission dans ses propositions législatives) pour atteindre ce niveau d’ambition, sans perdre de vue, bien sûr, l’aspect solidarité entre États membres.
Enfin, il reviendra à la future présidence du Conseil d’inscrire l’ambition retenue dans une nouvelle «contribution déterminée au niveau national» («NDC») de l’Union européenne à soumettre au Secrétariat de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques en 2025.
Communiqué par le ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité