LA VILLE, UN LABORATOIRE DE L’HUMANITÉ

L’avenir, c’est aussi faire corps avec le passé et l’Histoire. Et si cette phrase résumait à elle seule la situation du Luxembourg Institute of Science Technology, placé à Belval, au pied des haut-fourneaux qui témoignent de l’histoire sidérurgique du Luxembourg ? Francesco Ferrero et Djamel Khadraoui, employés du LIST et spécialisés dans le concept de Smart City, évoquent ses principaux aspects et plus particulièrement quelques projets menés par l’institut autour de la mobilité.

« Le concept de Smart City touche à tous les pans de la société: énergie, gouvernance,… Au LIST nous nous intéressons entre autre à la mobilité. Nous travaillons sur cette thématique afin d’optimiser la façon dont les gens se déplacent. Et cette approche tient compte de la composante humaine, psychologique et comportementale, car nous sommes conscients que ce n’est pas uniquement la technologie qui va tout changer, l’Homme et ses habitudes ont aussi un grand rôle à jouer » explique Francesco Ferrero, Lead Partnership Officer dans le domaine de la mobilité, de la logistique et de la Smart City.

« Une Smart City est un écosystème complexe qui regroupe beaucoup d’acteurs, c’est une ville gérée grâce à un traitement rapide de données informatiques sur les infrastructures, le trafic, les services, les commerces et l’humain. Tout cet ensemble permettra de résoudre les problèmes urbains, environnementaux, économiques et même sociaux d’une ville. La Smart City doit être avant tout au service de l’usager », poursuit Djamel Khadraoui, responsable d’unité de recherche dans le département « IT for Innovative Services » (ITIS) du LIST et spécialiste en computing, algorithmes et cloud.

Le projet « Mobility Urban Values »

Plus concrètement, le LIST a lancé le projet « Mobility Urban Values » en juin 2017. Il concerne aujourd’hui six villes dont la plupart déjà bien avancées dans la démarche de Smart City : Amsterdam, Barcelone, Gand, Helsinki, Fundão et Palerme. « MUV prend la forme d’un jeu sérieux, via une application disponible sur smartphone. Il suffit de s’inscrire pour jouer. Ce jeu, grâce à un système de points, encourage les personnes à utiliser la mobilité plus durable: à vélo, à pied, les transports en commun,…

En échange, les partenaires institutionnels ou les commerces locaux, mettent à disposition des prix en fonction des points gagnés. Pour résumer, notre projet est un assistant personnel de mobilité », détaille Francesco Ferrero. L’impact carbone sur l’environnement ou encore le nombre de calories brûlées s’affichent également sur l’écran.

A terme, les deux experts voient la mobilité comme un service. « Au lieu de posséder une voiture personnelle, les citoyens auraient un budget de mobilité et pourraient donc combiner plusieurs types de transport, ce qui offre la possibilité de voyager en train, en bus, à vélo ou en voiture partagée par exemple. Helsinki et Vienne ont déjà développé ce principe. Cette application se base sur plusieurs méthodes dont celles de la co-création, lorsque la conception du projet est réalisée collaborativement avec les utilisateurs, de la gamification ou encore de la gouvernance ».

La Smart City doit être au service de l’usager

La ville de Dudelange se porte candidate

En cette fin d’année, un deuxième appel d’offres a été lancé, celui-ci désignera six autres villes qui seront choisies pour mettre en place le projet « Mobility Urban Values ». La ville de Dudelange s’est portée candidate et « MUV » n’a pas la prétention de concurrencer les autres solutions comme Waze, TomTom ou Google, « nous nous intégrerons avec d’autres services existants, tels que le planificateur de voyage multimodal de la Verkéiersverbond, déjà existante au Luxembourg », précise Francesco Ferrero.

Pour autant, les deux experts restent formels, il n’existe pas une solution globale et standard en termes de Smart City qui résoudra tous les problèmes. « La typologie de la ville y est pour beaucoup. Je dirais même qu’il faut travailler par quartiers plutôt que par villes et s’intéresser aux communautés locales, aux lieux économiques et aux institutions locales pour définir des solutions efficaces et adaptées. Il y a par exemple beaucoup de différences entre Palerme et Helsinki en termes de culture ou de climat, les réponses aux problèmes ne sont donc pas les mêmes pour toutes les villes », étaye Francesco Ferrero.

Toujours est-il que l’aspect humain prend une place importante dans la vision des deux experts. Ils concentrent leurs efforts sur des conceptions qui mettent l’Homme au centre de leurs préoccupations, sans nécessairement se focaliser sur le 100% technologique. « Je me souviens par exemple d’un projet au côté humain magnifique dans une maison de retraite à Helsinki. Les personnes âgées avaient une clé USB autour du cou avec quelques photos des membres de leur famille, il suffisait simplement d’un ordinateur pour les rendre heureux ».

Une série de conférences sur la Smart City

Selon les chiffres de l’ONU, 70% de la population mondiale peuplera les villes et cette tendance progressive s’observe depuis le 18e siècle suite aux révolutions industrielles, l’une des causes principales de l’exode rural. Cette forte concentration d’êtres humains dans les villes implique plusieurs problématiques en termes de consommation d’énergie, d’eau potable, de mobilité, de production de déchets etc.

« Nous percevons ainsi la ville comme un laboratoire de l’humanité. Si l’on solutionne un problème d’énergie en ville, on le solutionne partout et ainsi de suite. La technologie peut nous aider dans cette démarche pour accélérer nos recherches, grâce, par exemple aux simulations et à l’exploitation des données ». Le LIST et le Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER) se sont associés pour accueillir l’édition 2019 du Symposium et de l’ADIMAP les 5 et 6 mars prochains sur le campus universitaire de Belval et soutenu par l’ASBL LuxReal. « Cette dixième édition portera sur l’émergence des villes intelligentes et plus précisément sur plusieurs axes comme la gouvernance publique, les infrastructures technologiques, la mobilité, l’éthique au niveau des libertés publiques ou de la protection des données, le secteur santé ou encore le monde du travail ». Offrant des perspectives de transformation du management et des organisations publiques à travers des panels d’experts, des ateliers scientifiques et des démonstrations technologiques, les co-organisateurs entendent promouvoir une culture de discussion et de débats entre chercheurs, politiques, entreprises privées et sociétés de conseil œuvrant dans le domaine de la Smart City.

Plus d’informations sur le site : www.symposium-managementpublic.com

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