L’oiseau bleu pourra-t-il chanter tout ce qui lui plaît?
Fin du mois d’avril, le rachat potentiel de Twitter par Elon Musk était annoncé pour la modique somme de 44 milliards de dollars. Cette révélation, suivie de nombreuses péripéties, a secoué la toile et nombreux sont ceux qui ont pris la parole: les uns se réjouissent d’avoir un fervent défenseur de la liberté d’expression à la tête d’un des plus gros réseaux sociaux, alors que d’autres s’en inquiètent.
Elon Musk et Twitter
Le fondateur de Tesla est un utilisateur fidèle du média Twitter. Il y est particulièrement actif et communique énormément sur ses aventures entrepreneuriales. D’ailleurs, le deuxième tweet le plus «liké» de toute l’histoire, comptabilisant 4,8 millions de mentions «j’aime», a été posté par Elon Musk. Il y évoque avec ironie un hypothétique futur rachat après celui de Twitter: «Next I’m buying Coca-Cola to put the cocaïne back in» («Ensuite je vais acheter Coca-Cola pour y remettre de la cocaïne»). Le chef d’entreprises utilise donc la plateforme comme un élément central dans sa communication et y montre une personnalité ironique et piquante… peut-être même trop pour certains.
La liberté d’expression: quelles limites?
Elon Musk est connu pour son amour de la liberté d’expression: il a justifié l’achat de Twitter par sa volonté d’en faire une plateforme dédiée à ce droit fondamental et où la censure n’aurait pas sa place. Il est vrai que le réseau social dispose de mesures de modération qui visent la suppression des messages et des comptes ne respectant pas son règlement. Par exemple, l’ancien président des États-Unis, Donald Trump, a été banni en janvier 2021 pour incitation à la violence. Toutefois, ce système est-il comparable à de la censure? Pour le milliardaire américain et ses admirateurs, la réponse est oui. Mais tout le monde n’est pas du même avis.
Nombreux sont ceux qui se sont inquiétés de ce rachat. À la suite de son annonce, 26 ONG ont adressé aux marques une lettre ouverte leur demandant de boycotter Twitter si Elon Musk tenait ses promesses. Parmi ses signataires, nous retrouvons Media Matters for America, Accountable Tech ou encore UltraViolet qui luttent contre la désinformation et défendent des causes comme la lutte contre le racisme ou l’homophobie. Concrètement, ils ont demandé aux marques de ne plus diffuser leurs publicités sur la plateforme et exigé que les personnalités évincées ne soient pas autorisées à réactiver leur compte. En réponse, Elon Musk a dévoilé son ambition d’affranchir Twitter de l’influence des entreprises en tirant ses revenus de la vente d’abonnement premium.
Les inquiétudes des organisations et de leurs alliés sont peut-être fondées puisque plusieurs plaintes pour sexisme et racisme au sein de l’entreprise Tesla ont été déposées contre Elon Musk. Quoi qu’il en soit, ce dernier devra respecter la loi et, en Europe, le Digital Services Act a été adopté par le Conseil et le Parlement européens. Ce texte a pour but de freiner et de réprimer les contenus illégaux sur les réseaux sociaux, notamment en suspendant les utilisateurs qui tiendraient des discours haineux. Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, a rappelé que «quel que soit le nouvel actionnariat, Twitter devra s’adapter totalement aux règles européennes».
Par P. Paquet