Mobilité douce: un appel à changer de braquet

La mobilité est non seulement un levier clé dans la lutte contre le changement climatique, mais aussi un paramètre important qui contribue à la qualité de vie. Et les élections communales ont représenté une nouvelle occasion d’enfoncer le clou pour les promoteurs des moyens de transport verts et «doux». Alors que les équipes en place ces six dernières années s’apprêtent soit à laisser la main, soit à rempiler pour un nouveau mandat, plusieurs associations ou membres de la société civile ont formulé des suggestions à destination des nouveaux élus qui sont attendus au tournant. Petit tour d’horizon des revendications de l’asbl ProVelo.lu qui, dès janvier, appelait les futurs responsables communaux à repenser la mobilité et les espaces publics pour y faire de la bicyclette la véritable petite reine.

De l’importance de la planification

54%, c’est le taux des déplacements inférieurs à 5 km effectués par les résidents luxembourgeois. Et cette courte distance est parcourue en voiture 35 à 65% du temps. À eux seuls, ces chiffres démontrent qu’une certaine responsabilité incombe aux pouvoirs locaux en ce qui concerne nos habitudes de mobilité. Le temps est donc venu de mouiller le maillot.

En matière de planification, ProVelo plaide pour la mise en place de SUMPs (Sustainable Urban Mobility Plans), de plans directeurs vélo ou de concepts cyclables communaux ou intercommunaux (et donc cohérents au-delà des frontières communales) pour la mobilité quotidienne. Ceci devrait, toujours selon l’asbl, aller de concert avec une intégration des besoins de la mobilité active lors de l’élaboration de chaque projet d’aménagement ou de réaménagement de l’espace public communal et de tous les PAG et PAP de manière à «redistribuer l’espace public de façon équitable entre les différents modes de transport, réduire le trafic de transit intra-agglomération et assurer que la mobilité active puisse (mieux) remplir le rôle important qui lui incombe dans la mobilité quotidienne au niveau communal».

Pour ce faire, l’association encourage chaque commune du pays à nommer un échevin à la mobilité – voire à créer un poste de «responsable de la mobilité active/durable» qui serait à l’écoute des usagers et participerait à l’élaboration de tout projet pour sensibiliser aux enjeux relatifs à la mobilité durable – mais aussi à assurer la participation citoyenne lors de la planification ou du réaménagement de l’espace public.

Des infrastructures attractives

En matière d’infrastructures, les lacunes semblent encore nombreuses malgré le développement louable des pistes cyclables au cours des dernières années. Avec (entre autres) ses couloirs cyclables qui, parfois, s’arrêtent net et ses itinéraires qui prennent des détours, le réseau manque de sécurité, de cohérence, de praticité et de confort pour inciter davantage d’utilisateurs à l’emprunter. Ainsi, l’amélioration des chemins existants est tout aussi cruciale que la création de nouvelles pistes. À cet égard, ProVelo recommande aux communes de prioriser leurs axes structurants, mais aussi d’élargir leur regard pour considérer les autres facteurs qui incitent à enfourcher un vélo. L’asbl suggère donc la mise en place d’une signalisation qui facilite l’orientation des cyclistes et crée des liens entre les réseaux locaux, régionaux et nationaux, l’introduction, dans les règlements des bâtisses, de quotas d’emplacements réservés aux vélos dans les résidences et la mise en place conséquente de places de stationnement pour vélos (pour visiteurs et employés) auprès de tout établissement public. Elle encourage d’ailleurs les communes à inciter les entreprises privées de leur territoire à transposer cette approche à chaque bâtiment faisant office de lieu de travail. Enfin, il serait attendu des mêmes établissements qu’ils mettent à disposition douches et vestiaires avec casiers pour accroître le confort des employés qui pédalent jusqu’à leur lieu de travail.

Une certaine responsabilité incombe aux pouvoirs locaux en ce qui concerne nos habitudes de mobilité

Pour l’asbl, la mobilité active ne doit pas seulement concerner la mobilité individuelle. Parce que le transport de marchandises est actuellement responsable de 15% des déplacements urbains et que ce taux est amené à croître substantiellement à l’avenir, elle prône la création de centres de distribution urbains (micro-hubs) dans les agglomérations principales pour rendre possible une distribution «du dernier kilomètre» en vélo-cargo, par exemple.

Entre éducation et incitations

Consciente que les habitudes de mobilité se construisent dès le plus jeune âge, ProVelo plaide également pour que les enfants puissent se mettre en selle sans danger. Elle prioriserait pour cela l’aménagement de chemins sécurisés qui réduiraient au maximum les conflits potentiels avec d’autres usagers de la route et qui mèneraient aux écoles fondamentales à partir de tous les quartiers. Autre idée: elle suggère la mise en place de «vélos-bus» qui, sur le même principe que les «pédi-bus», permettraient d’accompagner les enfants à l’école à partir de points de rassemblements déterminés.

Et pour qu’un maximum d’usagers éclairés puisse profiter des efforts qu’elle préconise, l’association conseille aux communes de majorer les subsides étatiques pour l’acquisition de vélos, notamment pour donner un coup de pouce supplémentaire à l’achat de modèles électrifiés ou cargos.

Mises bout à bout, ces mesures devraient permettre de rendre la bicyclette plus attractive que la voiture sur les courtes et moyennes distances et, ce faisant, d’apaiser le trafic motorisé et d’améliorer la qualité de l’air et de vie! «Compte tenu des défis actuels, faire quelque chose pour la mobilité active aux dépens des automobilistes ne peut désormais plus être considéré comme du «courage politique» – cela devient une évidence. Par contre, ne pas en faire assez, assez rapidement, devient un choix politique de plus en plus risqué!», considère l’asbl ProVelo.lu.

Par A. Jacob