BUS ÉLECTRIQUES : LE LUXEMBOURG EST DANS LES TEMPS
Chargé de direction au ministère de la Mobilité et des Travaux publics, Alex Kies est confiant: le réseau de transports du RGTR est dans le bon tempo et sa mutation vers le tout électrique, et par conséquent le « zéro émission», se déroule selon le calendrier prévu. Même si les usagers en sont moins conscients que les riverains ! Etat des lieux.
Où en est-on dans l’électrification du réseau RGTR ?
Cette grande aventure a débuté en 2016 avec la mise en service de premiers bus électriques hybrides. Ils étaient limités au secteur urbain et présentaient surtout l’inconvénient de devoir rentrer au dépôt pour être rechargés. Les véhicules 100% électriques ont été livrés en 2018. Cette fois, ils étaient suffisamment autonomes : plus besoin de cesser le service en cours de route… Désormais, l’objectif est de toute façon bien défini: le ministre a fixé à 2030 la date butoir pour que l’ensemble du réseau soit électrifié, ou en tout cas synonyme de « zéro émission polluante». Car à moyen et long termes, nous dépendons évidemment des progrès technologiques.
Voilà qui implique une montée en puissance graduelle d’ici 2030…
Oui, et il faut agir sur différents fronts. Nous réorganisons le réseau lui-même et un marché sera lancé pour que 40 à 45% de ce même réseau soit couvert par des bus électriques en 2025.
Très précisément, justement, à ce jour, quels sont les chiffres ?
Aujourd’hui, 1300 bus sont recensés, ce qui correspond à un millier en circulation chaque jour. Il est en effet nécessaire d’avoir toujours une capacité en réserve en cas de panne. Par rapport à l’ensemble de la flotte, cela représente 7 à 10%, et en termes de kilométrage 6%, le reste étant mobilisé sur des lignes urbaines. Ce sont des chiffres satisfaisants à l’échelle d’un pays. Seuls des réseaux de métropoles affichent des statistiques comparables, alors que pour notre part, nous avons des 1300 le nombre de bus recensés au sein du réseau RGTR lignes interurbaines et nous desservons des zones rurales.
Bénéficier d’un air moins pollué
Les bus électriques sur les lignes rurales, c’est donc pour plus tard?
Sur le plan de la méthode, il s’agit d’abord effectivement de passer en électrique en milieu urbain. Il ne faut pas oublier que cette mutation induit aussi des infrastructures spécifiques, dans les dépôts, ou certaines stations. Par ailleurs, nous sommes tributaires des batteries et de l’évolution de leur autonomie. Dans les régions peu denses, avec des distances plus longues d’un arrêt à l’autre, les batteries actuellement sur le marché ne se révèlent pas adéquates. Cela étant, on constate des progrès, comme les automobilistes peuvent également le noter: les voitures, au début, avaient une autonomie de 100 km. Puis on est passé à 250 et désormais même davantage. Même principe pour les bus: en 2016, nos premiers hybrides avaient… 10km d’autonomie en électrique! D’une manière générale, il y a une vraie difficulté à planifier nos trajets en zone rurale. Cela dépend de la distance, des points de recharge à proximité, mais aussi du relief de l’environnement, ou encore de la saison. Car on consomme davantage d’électricité en montée et en été quand il faut activer la climatisation par exemple. Planifier est plus aisé en ville, surtout que l’on dispose désormais de stations et pôles où l’on peut recharger en dix minutes!
Et les usagers dans tout cela?
Dans le bus, il y a toujours un peu de bruit dû aux mouvements, les passagers constatent moins de bienfaits que les riverains qui approuvent qu’il y ait moins de nuisances sonores et bénéficient d’un air moins pollué.
En dehors de l’aspect environnemental, quels sont les autres bénéfices du tout électrique ?
Au niveau du coût, le véhicule est plus onéreux à l’achat mais la maintenance est moins coûteuse. Nous disposons par ailleurs d’emplacements pour la recharge des batteries dans certains pôles (stade, aéroport). Tout devient plus aisé également en matière de planification, même s’il faut encore cinq bus électriques quand quatre diesel étaient nécessaires. Mais la technologie progresse, les grands constructeurs ont la puissance pour développer des batteries moins volumineuses mais synonymes de plus d’autonomie. C’est avec ces moyens nouveaux aussi que nous pourrons irriguer l’interurbain et les régions rurales.
Sans compter votre propre expérience ?
Nous avons beaucoup appris, accumulé collectivement une vraie expertise… Les équipes sont désormais formées, nous savons aussi choisir les bons bus. On a commencé tôt, dès 2009. Ça paie… et cela fait de nous une référence mondiale!
Par E. Di Vincenzo
Photo: ©Sébastien Goossens