ÉLECTROMOBILITÉ ET TRANSPORTS EN COMMUN, UNE IDYLLE QUI ROULE
Poussée par les directives européennes, la capitale luxembourgeoise investit dans l’e-mobilité pour renouveler sa flotte d’autobus. D’ici 2030, celle-ci sera 100% électrique. C’est en tout cas l’objectif fixé par les élus locaux. Patrick Goldschmidt, échevin en charge de la mobilité à la Ville de Luxembourg, présente les principaux avantages d’une telle motorisation pour le développement d’un réseau de transports en commun plus efficient et en adéquation avec les préoccupations environnementales.
Comment s’organisent les transports en commun et notamment les autobus électriques et hybrides ?
Qu’ils soient standards ou articulés, 150 bus de différentes capacités circulent à Luxembourg-Ville sur plus de 30 lignes, dont trois sont électrifiées. Nous avons notre propre réseau de bus même si un tiers des véhicules est exploité par un sous-traitant.
La Ville détient cinq bus hybrides électriques en possession et en sous-traitance et sept bus 100% électriques. Actuellement, deux types de recharge existent : soit l’« overnight charging » qui permet de charger le bus la nuit pour qu’il puisse rouler toute la journée, soit l’« opportunity charging » qui permet de recharger partiellement la batterie en journée. C’est ce dernier qui est aujourd’hui utilisé pour les véhicules de la capitale.
Nous souhaitons que notre flotte soit 100% électrique au niveau des bus standards et articulés en 2030. Ensuite, il faudra choisir le type de stations de rechargement. L’« overnight charging » est avantageux mais il nécessite une très grande quantité d’énergie localement.
Quelles sont les principales caractéristiques des bus électriques qui circulent dans la capitale ?
Parmi les sept bus électriques de Volvo, deux sont de première génération et leur capacité s’élève à 94 kWh. Les cinq autres sont de deuxième génération et sont beaucoup plus performants, avec une capacité de 260 kWh chacun. En moyenne, leur consommation est de 1 kWh par kilomètre, on peut donc aisément calculer la distance qu’un bus est capable de parcourir à batteries pleines.
Au terminal, deux pantographes permettent de recharger deux bus simultanément : 300 kWh en une heure et 150 kWh en 30 minutes. En général, nous comptons sur des recharges de cinq à sept minutes pour qu’ils soient en mesure de rouler tout au long de la journée.
Quels sont les avantages du 100% électrique ?
L’avantage le plus évident est son faible impact sur l’environnement et le peu de pollution qu’il engendre. En effet, l’énergie électrique n’émet pas de CO2 et n’altère donc pas la qualité de l’air. C’est d’autant plus important lorsqu’on sait que les chauffeurs d’un bus diesel actuel doivent par exemple laisser tourner leurs moteurs au terminal. Pourtant, les avantages vont plus loin que les seuls aspects écologiques.
Le 100% électrique réduit considérablement le bruit des transports, surtout dans les quartiers traversés par les bus et à leurs arrêts. C’est un plus pour les habitants, mais aussi pour les conducteurs qui jugent la conduite d’un bus électrique plus agréable. La réaction est tout aussi positive chez les passagers qui ne sont plus perturbés par le bruit des moteurs lorsqu’ils circulent.
Faire en sorte que les citoyens utilisent les transports en commun
Selon vous, est-ce difficile de changer la mentalité des citoyens, de les inciter à privilégier les réseaux de transports en commun au détriment de la mobilité individuelle ?
En 2018, nous avons comptabilisé 40,3 millions de voyageurs et ce chiffre est en nette augmentation en raison d’une population résidente et active toujours en croissance dans la capitale. Mais cette hausse s’explique également par le délaissement de la voiture au profit des transports en commun. C’est un fait, les jeunes les utilisent plus que leurs aînés et semblent moins attirés par la possession d’une voiture.
Certes, il est difficile de changer les mentalités, mais nous essayons d’inciter les citoyens à utiliser les transports en commun. Il est donc nécessaire de réorganiser notre réseau de bus pour leur offrir de nouvelles alternatives en proposant davantage de lignes circulaires. Celles-ci ne feront sens que si les lignes RGTR restent en périphérie, avec de vraies gares. Notre souhait n’est pas de pénaliser les personnes qui viennent de l’extérieur de la ville, mais bien d’organiser notre réseau de manière plus efficiente.
Comment imaginez-vous la ville de demain et quelles seront les prochaines innovations qui toucheront les bus électriques ?
Personnellement, je l’imagine avec beaucoup moins de voitures et surtout des mentalités qui changent. Les logements seront plus verts et plus proches des lieux de rencontre, de travail, même si celui-ci sera impacté par le télétravail. Cet écosystème favorisera la mobilité, le commerce,… Tout le monde est responsable de la mobilité, qu’elle soit en commun, à pied ou à vélo. Qui dit mobilité douce, dit forcément nouvelles infrastructures et pistes cyclables. Il y aura un juste milieu à trouver.
De plus, la population continuera d’augmenter ces prochaines années à Luxembourg- Ville. De nouveaux quartiers seront donc créés avec de nouvelles lignes pour les transports en commun. Nous concernant, le vrai challenge sera de maintenir la qualité de notre réseau de bus. Si celle-ci diminue, les usagers changeront leurs moyens de transport. Il faudra continuer à optimiser notre réseau et à en améliorer le confort.
Enfin, d’un point de vue plus technique, le chauffage et la climatisation sont les sujets qui animent les discussions et les innovations en matière de bus électriques. Les deux consomment beaucoup d’énergie sur la batterie lorsqu’ils sont utilisés au détriment de l’autonomie, c’est un vrai défi pour les constructeurs.
Par P. Birck
Photo: © Agence Kapture