Journée mondiale des rivières: l’état écologique de nos cours d’eau joue un rôle important aussi dans la protection contre les inondations
À la lumière des inondations qui se sont produites cet été au Luxembourg et à travers l’Europe, la Journée mondiale des rivières, le 26 septembre 2021, est l’occasion de considérer quel rôle important remplissent des cours d’eau en bon état écologique, et quels avantages ils apportent en matière de prévention et de contrôle des inondations.
Selon les chiffres établis par l’Administration de la gestion de l’eau (AGE), dont la mission principale est la gestion durable et intégrée des ressources en eau du Luxembourg, un peu plus de la moitié des cours d’eau de surface luxembourgeois (51%) sont dans un état écologique moyen, près d’un quart sont dans un état écologique insatisfaisant (23%) et un cinquième dans un état écologique mauvais (20%) (données recueilli au cours de la période 2015-2021)[1]. Ces chiffres doivent vraiment interpeller chacun d’entre nous.
L’état écologique d’un cours d’eau est évalué en appliquant des méthodes standardisées au niveau européen et se base sur une analyse de la qualité de l’eau (paramètres physico-chimiques), des organismes vivant dans le cours d’eau (paramètres biologiques), de la structure du lit du cours d’eau et de ses berges et de l’écoulement de l’eau dans le cours d’eau (paramètres hydromorphologiques). Un autre aspect très important des paramètres hydromorphologiques est la « continuité écologique » longitudinale du cours d’eau, qui correspond essentiellement à la possibilité donnée à la faune et la flore aquatiques et aux sédiments de se déplacer dans le système fluvial.
« Dans le passé, beaucoup de tronçons de cours d’eau ont été redressés, ou pire encore, emprisonnés dans des lits cimentés, non seulement au Luxembourg, mais aussi dans la majeure partie de l’Europe, principalement pour des raisons de commodité et aussi avec l’espoir de mieux protéger les villages des inondations, selon ce qui était généralement admis à ce moment », explique Jean-Paul Lickes, directeur de l’Administration de la gestion de l’eau. « En réalité, c’est tout le contraire: avec suffisamment d’espace, les cours d’eau fournissent aux hommes et à la nature des services écosystémiques des plus importants, notamment en ce qui concerne la régulation de l’eau et le contrôle des inondations, le recyclage des nutriments et le filtrage de l’eau, ainsi qu’un habitat pour une flore et une faune riches et diversifiées », souligne-t-il.
En ce qui concerne les obstacles, actuellement quelques 1.000 barrières et barrages de différents types et dimensions sont présents dans les cours d’eau luxembourgeois. Ces obstacles empêchent le libre développement du cours d’eau et, par conséquent, diminuent, une fois de plus, la capacité des écosystèmes riverains à remplir pleinement leurs fonctions écologiques, y compris la rétention dans les zones alluviales et la régulation des débits d’eau.
« Dans un pays aussi densément peuplé que le Luxembourg, ramener les cours d’eau à un bon état écologique est un grand défi, qui nécessite la coopération et volonté de nombreux secteurs, acteurs et partenaires, en particulier celles des communes, mais aussi de tous nos citoyens », ajoute le directeur de l’Administration de la gestion de l’eau. Les pressions exercées sur nos fleuves et rivières au Luxembourg sont multiples et comprennent le ruissellement des terres agricoles, l’extraction d’eau à usage privé et public, ainsi que les rejets des stations d’épuration et de l’industrie. Cependant, l’espace disponible pour les cours d’eau au Grand-Duché pose un problème majeur et encore méconnu. Les rivières ont besoin d’une certaine étendue pour remplir leur fonction écologique: elles doivent être capables de s’accroître et de s’étendre et de récupérer, de serpenter ou de former des méandres et de tracer ainsi leur propre cours. Pour ce faire, elles ont besoin de lits propres et de berges naturelles, de bandes riveraines, de plaines inondables naturelles, et elles doivent être libres de barrières pour permettre la circulation sans entraves des sédiments et de la faune et de la flore le long de la rivière.
L’évaluation par l’Administration de la gestion de l’eau durant la période 2015-2021[2] indique qu’aucun des cours d’eau luxembourgeois n’est actuellement en bon état hydromorphologique, tandis que 66% sont en mauvais état. Ceci est en grande partie une conséquence de l’état des zones alluviales et celui de la continuité écologique qui, si elle est bonne ou très bonne pour 5% des cours d’eau, est mauvaise pour 66% d’entre eux.
Pour faire face à ce problème, l’Administration de la gestion de l’eau en collaboration avec de nombreux partenaires, est, entre autres, engagée dans un ambitieux programme de remise en état naturel, ou proche de l’état naturel, des cours d’eau luxembourgeois. En effet, la renaturation de cours d’eau permet d’améliorer l’état écologique du cours d’eau tout en contribuant à la réduction du risque d’inondation. Deux grands projets phares sont actuellement en préparation: la revitalisation de l’Alzette, de Luxembourg-Ville à Mersch, ainsi que celle de la vallée de la Pétrusse sur le territoire de la Ville de Luxembourg.
Plusieurs tronçons de rivière ont déjà été revitalisés en collaboration avec les communes concernées, l’Administration de la gestion de l’eau et l’Administration de la nature et des forêts depuis 2001, tel que par exemple le tronçon de l’Alzette qui va de Steinsel à Walferdange[3], ou encore l’Alzette à Schifflange au lieu-dit Dumontshaff[4], mais aussi le tronçon de l’Ernz Blanche au lieu-dit Brill à Koedange[5]. Ces sites restaurés offrent une belle opportunité pour découvrir à quoi peut ressembler un paysage fluvial plus naturel et intacte ici au Luxembourg.
Le bon état écologique de nos cours d’eau est un objectif que le Luxembourg, ainsi que les autres membres de l’Union européenne, se sont engagés à atteindre sous la directive-cadre sur l’eau (directive 2000/60/CE). Sous cet engagement, l’Administration de la gestion de l’eau publie depuis 2009 tous les six ans un plan de gestion qui décrit, entre autres, les mesures à mettre en œuvre pour atteindre le bon état écologique de nos cours d’eau. Le projet du troisième plan de gestion est actuellement soumis à une consultation du public jusqu’au 17 octobre 2021 (voire jusqu’au 17 novembre 2021 pour les communes).
La consultation publique du projet du 2e plan de gestion des risques d’inondation (Hochwasserrisikomanagementplan) est également en cours. Le plan de gestion des risques d’inondation présente l’instrument principal de la mise en œuvre de la directive relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation (directive 2007/60/CE). Des observations écrites peuvent encore être remises par les communes jusqu’au 24 octobre 2021. Les citoyens qui souhaitent formuler un avis peuvent donc le faire par l’intermédiaire des communes.
Les deux plans de gestion sont disponibles sur le site web de l’Administration de la gestion de l’eau (http://www.waasser.lu) sous l’onglet « L’administration » sous les cadrans « Directive-cadre sur l’eau » et « Directive inondation ». Vous y trouverez toutes les informations relatives aux consultations publiques, ainsi que les enregistrements et informations relatives aux évènements qui ont eu lieu cet été, et qui fournissent une introduction aux projets des plans et aux mesures y prévues.
L’Administration de la gestion de l’eau (AGE)
Depuis sa création en 2004, l’Administration de la gestion de l’eau, placée sous la tutelle du ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, a pour mission d’assurer une gestion durable et intégrée des ressources en eau au Luxembourg. Le travail de l’AGE, en collaboration avec un grand nombre de partenaires, comprend notamment la supervision de l’approvisionnement en eau potable, la surveillance et la protection des eaux de surface ainsi que des eaux souterraines et la gestion intégrée des risques d’inondation. L’AGE coordonne également la planification du traitement des eaux usées, s’occupe du volet des pollutions accidentelles des eaux, de la prévision des crues ainsi que des autorisations liées à l’eau. Une autre mission importante qui incombe à l’AGE consiste à représenter le Luxembourg, entre autres, au sein des commissions fluviales internationales et au niveau européen.
[1] Données établies dans le contexte de l’état des lieux, partie intégrante du projet du 3e plan de gestion des districts hydrographiques actuellement en phase de consultation publique: https://bit.ly/3vzAuoB.
[2] Données établies dans le contexte de l’état des lieux, partie intégrante du projet du 3e plan de gestion des districts hydrographiques actuellement en phase de consultation publique: https://bit.ly/3vzAuoB.
Source: SIP